Article écrit par Pascal DORIGUZZI en Août 1989, dactylographié par Florence DU PEY et Jean-Michel SANDRAL en Décembre 1989, et publié dans la revue "Les Temps Modernes" en Mai 1992 avec l'aimable concours du Professeur Cyrille MEGDICHE.

 

LE TRAVAIL DES HANDICAPES :

DEBATS PARLEMENTAIRES ET ENJEUX SOCIAUX

Pascal Doriguzzi

 

Jusqu'en 1914, on appelle "infirmes", ceux qui ne disposent pas de leurs pleines facultés phy-siques ou mentales. Le terme recouvre un statut social précis : les aliénés relèvent de la loi du 30 juin 1838 sur le placement en hôpital psychiatrique ; les infirmes physiques dépendent de la charité privée. Rapport individuel entre le bénéficiaire et le donateur, celle-ci constitue un devoir moral pour le riche envers ceux défavorisés par le destin. Devoir transformé par le pape Léon XIII en droit moral du pauvre sur la fortune du riche (I). Cette exigence va s'institu-tionnaliser à travers des organisations caritatives, des sociétés de secours mutuel, d'origine cléricale ou patronale. Le statut social des infirmes reste droit moral jusqu'au début du XXème siècle. La loi du 14 juillet 1905 sur l'assistance obligatoire aux vieillards, infirmes et incura-bles, modifie le statut social de ceux qui restent des infirmes. En remplaçant les aléas de la charité par l'assistance publique, elle transforme le devoir moral en obligation politique.

Clients de la charité privée ou bénéficiaires de l'assistance publique, les infirmes restent des objets passifs seulement capables de donner au bourgeois l'occasion d'un exercice de moralité, et à partir de 1905, de fournir à la République des raisons de poursuivre une politique sociale entreprise depuis 20 ans. La loi du 14 juillet 1905 consacre et généralise les hospices civils où sont regroupés vieillards, infirmes et incurables, mais ne témoigne d'aucun souci de la vie sociale de ces derniers et encore moins de leur travail éventuel. La place de l'infirme se situe hors du monde de la production. L'assistance publique assure la survie de ces personnes dans un statut d'inactivité sociale, en leur garantissant un revenu sans lien avec la sphère du travail.

La guerre de 1914-1918 ouvre un important débat sur l'emploi de centaines de milliers de "mutilés". On les appelle ainsi par reconnaissance de la dette de la Nation envers ses défenseurs. Cette reconnaissance va se concrétiser dans le versement de pensions. Celles-ci sont rarement suffisantes pour vivre, et les difficultés professionnelles aidant, le statut des mutilés se rapproche de celui des infirmes civils. Depuis 1914, les associations d'anciens combattants font campagne à ce propos.

Ici commence l'histoire des travailleurs handicapés. Histoire de notions d'abord : "mutilés", "invalides", "travailleurs handicapés". Mais plus profondément chacun de ces termes recouvre un statut social précis et un traitement institutionnel différent.

Histoire d'intérêts ensuite : les interventions politiques des organisations patronales modèlent fortement ces notions et assurent la perpétuation des conceptions qui leur sont associées. La volonté de ces organisations de voir attribuer des statuts mineurs et précaires à ceux dont elles jugent que l'insertion dans les entreprises serait source de désordres et nuisible à l'autorité patronale, traverse les soixante-dix années de l'histoire en question. Elle a abouti à faire perdurer, à travers des périodes profondément différentes la minoration des travailleurs handicapés, et ce en maintenant une forte dissociation entre le revenu et l'emploi de ceux-ci.

L'histoire des travailleurs handicapés se décompose en trois grands moments : l'entre-deux-guerre, l'ère de l'Etat Providence de 1945 à 1975, la crise des années 1970-1980.

Ce sont les débats préparatoires au vote des lois sur l'emploi des travailleurs handicapés qui manifestent le plus clairement comment va être institué leur statut professionel et social. A l'occasion de ces travaux parlementaires, les représentants patronaux inaugurent en 1924, une terminologie spéciale. Conceptualisation qui se réduit à des formules de circonstance et à des discours de bon aloi, aussi bien dans le cadre de médicalisation du statut de travailleur handicapé en 1957, que lors de la réactualisation de ce statut en 1987.

I - La loi du 26 Avril 1924 : L'invention d'un discours

Cette loi aboutit après 9 ans de travaux législatifs, 9 rapports en commission, à la Chambre des Députés (M. Durafour) et au Sénat (M. Sarrault).

Elle tend à rendre obligatoire l'emploi des mutilés dans l'industrie privée et concerne les bénéficiaires de la loi du 31 Mars 1919 sur les pensions aux victimes de la guerre de 14-18 et les accidentés du travail, tels qu'ils ont été définis par la loi du 9 Avril 1898. Elle vise à adapter aù temps de paix, le traitement social des mutilés de guerre. La concurrence économique et la productivité reprenant le pas sur la mobilisation idéologique du conflit, le statut social des mutilés évolue: de "héros de la défense nationale", ils deviennent des "invalides". Leurs revenus se limitent souvent aux pensions.

Cependant la loi, qui assure l'emploi obligatoire des mutilés de la 1ère Guerre Mondiale, innove dans la conception de l'aide sociale sous la IIIème République : elle crée des règles spéciales sur le marché du travail pour imposer l'intégration professionnelle de personnes destinées à l'assistance publique. Ces dispositions sont violemment combattues par les représentants des intérêts patronaux au Parlement. Pendant les hostilités, les entreprises privées employaient pourtant de nombreux mutilés, en adaptant des postes de travail dans certains secteurs (métallurgies, mécanique, etc.)

Soucieuse d'éviter le qualificatif dévaluant "d'infirmes" aux poilus blessés, la représentation nationale préfère un terme qui les compare aux travailleurs valides. Mais "valide" signifie aussi "crédible" dans les actes légaux (contrats commerciaux , actes bancaires ...) Le préflixe "in" supposerait alors un déficit de crédibilité du travailleur étiqueté.

Le patronat joue de cette ambiguité pour limiter l'embauche de mutilés dans les entreprises. Il encense les héros de la Grande Guerre, lors des débats préalables au vote de la loi du 31 Mars 1919 sur les pensions aux victimes du conflit, pour ne pas avoir à leur faire une place dans le monde du travail. C'est que celui-ci constitue le lieu par excellence d'accomplissement du rapport social dans la société capitaliste, rapport d'argent et de travail certes, mais avant tout de pouvoir et de subordination. Ce qui gêne les patrons n'est pas tant le déficit de productivité supposé par l'embauche des mutilés que le caractère obligatoire de la loi qui veut les contraindre à leur donner du travail.En 1904-1905, les politiciens conservateurs défendaient l'initiative individuelle cari-tative (participation à des associations, à des sociétés de secours, etc.) contre l'aspect obligatoire de l'assistance publique. En 1924, ils veulent bien "faire beaucoup pour les mutilés", mais ils combattent la notion d'obligation légale. Le sénateur Japy explicite la position patronale en ce qui concerne le projet de déclaration de vacation de poste à la Préfecture, permettant la présentation prioritaire de travailleurs invalides, le 13 Avril 1924, dans un Sénat houleux :"...Les patrons agissent volontiers pour les mutilés, mais ce qu'ils ne veulent pas, ce qu'ils n'entendent pas, c'est qu'on les limite". Le principe libéral de l'initiative privée s'oppose ainsi à l'obligation légale.

Le débat sénatorial du 13 Avril 1924 met en scène un affrontement entre les adversaires de la loi et ses partisans (dont le Président de la République, Raymond Poincaré). Gaston Japy défend un amendement à l'article 6 du projet qui accorde un délai de huit jours à l'administration pour présenter un mutilé prioritaire à l'embauche pour toute vacation de poste.

L'amendement est signé par plusieurs parlementaires proches de certains groupes patronaux . Japy affirme : "Ces amendements nous ont été inspirés par des discussions à l'Union des Industries Métallurgiques et Ministères, d'accord avec l'Union Textile et beaucoup d'autres groupes industriels". Sarrault lui rétorque que : "Ce rapport Durafour à la Chambre des Députés (dit que) cette même Union des Industries Métallurgiques et Minières aurait donné son adhésion au projet de loi soumis aujourd'hui à vos délibérations" (2).

Le groupe présentant l'amendement lutte pied à pied pendant toute la discussion. Il défend des intérêts patronaux dans un contexte politique où la solidarité nationale n'a plus le même sens que celle signifiée dans la loi du 31 Mars 1919. A l'époque, l'Union Sacrée faisait de l'aide aux poilus blessés un devoir patriotique. Elle mobilisait la ferveur nationaliste. Après l'armistice, les intérêts particuliers redeviennent le principal moteur du jeu social et passent avant le souci des victimes du front. La solidarité prend un contenu différent : loin des nécessités de l'unité politique de la mobilisation, elle se résume à la distribution de pensions et de rentes que les problèmes d'emploi rapprochent des pratiques d'assistance de la loi du 14 juillet 1905.

L'attitude du groupe dirigé par le Sénateur Japy ne reflète cependant l'opinion que d'une partie du patronat : le débat rappelle - nous l'avons dit - les travaux du rapporteur Durafour avec les associations patronales (3). De fait, de nombreux parlementaires favorables au projet sont eux-mêmes dirigeants d'entreprises (celles de Maurice Sarrault emploient quatre cents ouvriers).

Les termes employés par les défenseurs des intérêts patronaux à propos du salaire accordé aux mutilés visent à accréditer une conception sociale : le Sénateur Delahaye parle de "l'industrie qui fait beaucoup pour les mutilés" (4). Cette généralité de circonstance se retrouve dans chaque débat sur le handicap, des origines jusqu'à nos jours. En fait, elle vient souvent justifier le refus de nouvelles mesures légales. L'argument économique du défaut de productivité n'est qu'un prétexte. Les patrons refusent avant tout que soient appliquées dans l'entreprise des mesures décidées à l'extérieur, de celle-ci, hors d'atteinte de leur autorité. Ils n'acceptent pas l'intrusion de travailleurs imposés par la puissance publique et jouissant de droits spécifiques. Non seulement leur légitimité en souffrirait, mais cela créerait un précédent portant atteinte à leur souveraineté. Aussi, un pourcentage d'embauche obligatoire de mutilés apparaît-il aux défenseurs des intérêts patronaux au Parlement comme une agression intolérable (les futures lois de 1957 et 1987 verront les pourcentages d'embauche obligatoire accompagnés de mesures d'exonération pour éviter la présence de travailleurs handicapés dans les entreprises).

L'entreprise doit donc rester une enclave privée dans le coeur de la République. La direction y décide la loi et les conditions auxquelles elle-même s'y soumet (5). Toute décision doit emprunter le canal officiel de l'autorité patronale, qu'il s'agisse de choix économiques importants ou des moments de pause permettant aux salariés de manger ou de se rendre aux toilettes. Tout acte réalisé dans l'entreprise est question de légitimité. Dès lors, un texte législatif obligeant les patrons fait figure d'entorse à l'ordre de la production. Il représente une décision extérieure imposée par une légitimité reconnue par les citoyens, mais de fait soumise au véto patronal dans l'enceinte de l'usine.

L'opposition conservatrice lutte donc contre l'obligation d'emploi des mutilés pour préserver l'autorité patronale dans l'entreprise. La pression des anciens combattants et de l'opinion publique rend cependant l'aboutissement législatif inéluctable (6). Les représentants patronaux le savent, qui marquent une opposition de fond avec le prétexte du manque de rentabilité des mutilés en ces temps de concurrence. Toutefois, l'argument devient vite secondaire et l'enjeu du travail législatif va consister à nantir le travailleur mutilé d'un statut particulier conforme aux intérêts patronaux.

Le mutilé, doit être, pour des raisons humanitaires, pouvu d'un emploi, mais d'un emploi subalterne. Légalement préjugé mineur, incapable de rendement, irresponsable. Le Comité des Forges obtient ainsi la diminution a priori de son salaire et son éviction des postes de responsabilité ou d'encadrement. Cette minoration des travailleurs invalides ne sera jamais remise en cause par les lois à venir "en faveur des travailleurs handicapés".

Aussi Monsieur Japy veut -il fixer un salaire "en faveur des mutilés" (7). Cette formulation réduit le mutilé à un être passif envers lequel l'industrie, non dépourvue d'humanité, fait un geste qui mérite reconnaissance. La "faveur" remplace le rapport professionel et, conformément à la pratique de certains "petits métiers", elle se monnaye en salaire et en statut. Elle coûte cher aux mutilés : admise dans la formulation même de leur emploi, l'expression sous-entend un effort des employeurs non pour embaucher des travailleurs mais pour "occuper des mutilés". Elle justifie la diminution de leur salaire et la minoration de leur statut. La faveur deviendra avec le temps un concept politique. Elle est le moule idéologique dans lequel les lois du 23 Novembre 1957 et du 10 Juillet 1987, toutes deux dites "en faveur de l'emploi des travailleurs handicapés", seront élaborées. La terminologie inventée en 1924 devient code. Elle constitue un ensemble de vocables que personne ne définit mais que chacun emploie en étant sûr d'être compris.

II - La loi du 23 Novembre 1957 : La médicalisation des travailleurs handicapés.

Après la seconde guerre mondiale, les sociétés occidentales connaissent un important développement des politiques sociales. En France, l'Etat Providence préconise la médicalisation des handicapés qui vient s'ajouter à la minoration des mutilés de 14-18 ; la loi du 23 Novembre 1957, dessaisit la société du handicap et le confie à la médecine. La médicalisation désigne le lieu d'insertion professionnelle des travailleurs handicapés ainsi que le rôle qu'ils jouent dans la production et la société : aussi bien de l'éducation, de l'habitat, de l'emploi que de la vie sociale. Une existence en apparté de la société ordinaire, un statut spécial est "offert" à l'handicapé tant aux plans des écoles spécialisées, centres d'hébergement, Ateliers de Travail Protégé, autant d'institutions marginalisant le handicap. Le salaire prévu est inférieur au S.M.I.G. La loi n'évoque pas les postes à responsabilité.

Exemplaire de la marginalisation opérée est l'usage que les intervenants dans le débat parlementaire font de la notion de "placement des travailleurs handicapés". "Placement" peut signifier emploi. Mais ce terme s'applique également à l'hospice, au lieu de vie,... Cette ambiguité parcourt toute la discussion : tantôt le terme concerne la profession, tantôt il s'agit de la place dans la vie quotidienne, plus généralement dans la société. Le Conseil de la République du 14 Novembre 1956 retient le premier sens. Mais le texte final qui sort de ses délibérations organise le travail des handicapés dans un contexte médicalisé (Centre d'Aide par le Travail -C.A.T.- Atelier de Travail Protégé -A.T.P.) ; dès lors, le placement prend le sens second d'une mise à l'écart du travailleur handicapé.

Les interventions du Député Ulrich à l'Assemblée Nationale font apparaître idéalement l'ambiguité en question. Il préconise la "thérapeutique occupationnelle" (ergothérapie) dans les établissements de soins comme élément de réadaptation professionnelle (8). Le titre III de la loi en discussion est "priorité d'emploi et placement en faveur des handicapés". Alors que les bureaux ordinaires de la Main-d'Oeuvre reçoivent dans un premier temps, la charge de trouver des postes de travail, au fil de la discussion, leur rôle se réduit au recensement (9) et ce sont les Commissions Départementales des Infirmes qui orientent les ayants droit.

Les organisations issues de la loi Cordonnier du 2 Août 1949 sur "l'assistance aux aveugles et grands infirmes" estiment, quant à elles, le pourcentage d'invalidité et jugent de l'opportunité d'un placement en centre ou hospice, d'une formation professionnelle, de l'entrée dans un A.T.P. ou dans un C.A.T.

L'A.T.P. (ou le C.A.T.) apparaît ainsi avoir un point commun avec "l'usine-ville" analysée par Jean-Paul De Gaudemar (10), où les travailleurs habitent, mangent, s'éduquent, partagent leurs loisirs etc...Comme celle-ci, l'A.T.P. est un lieu fermé, protégé et destiné au travail qui rappelle la doctrine "benthamienne" du couvent industriel : les employés, protégés de la société, en sont marginalisés, placés dans un statut sinon d'internes du moins de travailleurs nécessitant une protection légale. Certes l'A.T.P. et C.A.T. permettent une vie sociale à des gens qui ne sont pas intégrés. Mais ils demeurent avant tout le moyen d'éviter l'évolution des travailleurs handicapés en milieu ordinaire.

La médicalisation des travailleurs handicapés par l'Etat Providence renforce donc la minoration. Elle convient aux syndicats patronaux qui voient dans les Ateliers de Travail Protégé l'occasion de rejeter les salariés indésirables vers la médecine et qui pour cette raison, soutiennent le projet de loi. Cependant, les choses ne sont pas dites si crûment : la médicalisation est présentée comme le meilleur moyen de régler un "douloureux problème". Si les modalités d'exécution de la loi sont discutées parfois vivement au Parlement, son principe réalise un large concensus.

Le rapport de Marcelle Delabie (rapporteur de la Commission de la famille, de la population et de la santé publique au Conseil de la République) souligne ainsi la nécessité de soigner, de réadapter et de rééduquer. Certes, l'apprentissage, la formation professionnelle, la récupération du marximum des facultés relèvent d'interventions para-médicales, mais l'importance donnée par le projet aux lieux de travail médicalisés démontre que le phénomène ne s'arrête pas à la sortie des écoles.

Si Suzanne Girault, sénateur communiste, veut étendre l'obligation d'emploi aux services publics et entreprises nationales, son intervention "... ne diminue en rien les arguments de Mme le rapporteur ... Mon amendement ne veut ne rien gêner (l'action en cours) mais apporter quelques garanties aux intéressés" (11).

Albert Mora (député communiste) parle "d'organisations de malades", justifiant ainsi la médicalisation du handicap avant le vote final et dit de ce texte, qui "s'il ne le satisfait pas pleinement, il a le mérite d'exister"(12) .Curieux constat pour expliquer le vote positif d'un projet qu'il juge insuffisant, tout en "espérant qu'il sera un bon outil aux mains du Gouver-nement en cette période de pénurie de main-d'oeuvre". Curieux également le propos d'Albert Gazier (Ministre des Affaires Sociales), lorsqu'il répond à Camille Titeux à propos du pourcentage a postériori: "pourcentage très souple qui se modèle suivant les caractéristiques des entreprises" (13).

Mais l'objectif déclaré de favoriser l'emploi d'une catégorie de travailleurs, les débats parle-mentaires ne font que préparer la mise en relation de "malades" avec le monde économique. Le texte devient un apologue humanitaire que même des élus critiques à son endroit votent dans un unanisme scellant la minoration des travailleurs handicapés. L'esprit de compromis, d'Albert Gazier fait que le pouvoir d'obliger est renvoyé à l'autorité réglementaire et le pourcentage a postériori donne priorité aux moyens d'exonération de l'embauche directe. La "persuasion", et non plus l'obligation, doit encourager les employeurs à faire des efforts pour embaucher des handi-capés. Dès lors, l'application des dispositions de la loi du 23 Novembre 1957 étant laissée à la "bonne volonté" des patrons, celles-ci tomberont rapidement en désuétude.

Cependant cette loi restera dans l'histoire parlementaire dans la mesure où avec elle, l'expression de "Travailleurs handicapés" apparaît pour la première fois dans un texte législatif. Cette expression prend sens dans un rapport à une norme statistique, celle de l'individu social type, soit un individu moyen sensé représenter l'homme ordinaire.

De type masculin, blanc, d'âge mûr sans être vieux, en bonne santé, sans particularité physique ou mentale, ce fantasme sert d'étalon comparatif à tout candidat à une place dans le monde du travail. Ceux qui ne correspondent pas à ces critères : jeunes, handicapés, travailleurs trop âgés, femmes, immigrés,... sont des "cas sociaux" justiciables de procédures d'insertion spécifiques qui les nomment et les "traitent". La loi du 23 Novembre 1957 donne au travailleur handicapé un statut qui le met en norme et le distingue. Elle fait certes de "l'invalide" un "travailleur", mais un travailleur qui doit faire l'objet d'un traitement spécial.

Travailleur au statut professionnel minoré, au salaire diminué, le handicapé subit la stigmatisation la plus lourde dans le domaine de l'emploi.

III - La loi du 10 Juillet 1987 et la reproduction du statut du travailleur handicapé.

Une nouvelle loi "en faveur de l'emploi des travailleurs handicapés" est promulguée le 10 Juillet 1987. Elle adapte les principes de minoration et de médicalisation du statut du travailleur handicapé aux conditions de la crise économique des années 1970-1980. Elle intervient, en effet, au terme d'une quinzaine d'années de modification des procès de travail industriel et de chômage prolongé, de précarité de l'emploi et de recours massif à l'aide sociale qui s'en suivent. L'emploi précaire, entrecoupé de périodes d'assistanat, devient un mode de vie socialement reconnu et s'étend aujourd'hui à bien d'autres catégories de travailleurs (jeunes, femmes, immigrés, etc.)

La dégradation générale de la situation de l'emploi ne peut pas rester sans conséquence sur le statut des travailleurs handicapés. Par exemple, les mesures sociales prises contre le chômage prolongé des jeunes aboutissent à une destructuration durable des statuts de travail : déqualification et précarisation croissantes sont les principaux effets des travaux d'Utilité Collective, des Stages d'Initiation à la Vie Professionnelle et autres procédures de temps de crise. Or, ces types "d'emploi" concernent des tâches ordinairement sous-traitées par des A.T.P. ou confiées à des travailleurs handicapés mais sont, en termes d'incitations financières à l'embauche, plus avantageux pour les patrons que l'abattement de salaire accordé pour l'emploi d'un handicapé.

Disposant d'une main-d'oeuvre pléthorique et à bon marché, les employeurs ont moins recours qu'avant aux A.T.P. et aux C.A.T. pour les travaux d'entretien, nettoyage, petites réparations (électroménager, téléphone...), etc. Ils connaissent peu et respectent mal la législation sur les travailleurs handicapés. Ils y sont d'autant moins contraints que la loi du 30 Juin 1975 assure déjà un minimum vital à ceux-ci (Allocation aux Adultes Handicapés).

Les entrepreneurs profitent du contexte de la dépression du marché du travail et de la précarisation de l'emploi pour obtenir de nouveaux avantages et surtout s'affranchir encore un peu plus des contraintes légales qui sont censées peser sur eux en matière d'embauche de travailleurs handicapés. Les intérêts patronaux sont représentés lors des travaux préparatoires au vote de la loi. La Confédération Générale du Patronat Français, la Confédération Générale des Petites et Moyennes Entreprises, l'Union des Industries Métallurgiques et Minières, participent au débat préalable. Yvon Briant (C.N.I.), propose " l'exemption partielle ou totale des cotisations de sécurité sociale en faveur des entreprises qui emploient des handicapés, soit un complément de rémunération versé au salariés par l'Etat en cas de salaire réduit..." (14). L'employeur disposerait de salariés payés par l'Etat, dont l'embauche aurait une portée fiscale importante mais un intérêt professionnel secondaire. Le travailleur handicapé est une source d'avantages financiers, non un partenaire professionnel.

Les portes-parole du libéralisme économique au parlement obtiennent le relèvement du nombre des salariés rendant obligatoire l'embauche d'un (e) handicapé (e) : ce seuil passe de 10 à 20 salariés, mesure que Georges Chometon (majorité parlementaire) juge positive même s'il affirme que "ce seuil peut paraître pour certains un peu faible" (15), ainsi que la réduction du taux d'embauche obligatoire d'handicapés de 10 à 6 % des effectifs d'entreprise, pourcentage dont Chometon dit cependant que "certains pensent qu'il est encore excessif" (15), et enfin, la baisse de la "redevance" versée pour défaut d'embauche de 25.000 Francs à 16.000 Francs par an. Dans ses tentatives de justifier ces décisions, le gouvernement, invoquant le non-respect par les employeurs de leurs obligations, conclue que la seule façon de voir ces dernières respectées est d'en diminuer le poids. Les nombreuses possibilités, pour les patrons, de se soustraire à l'obligation de ce que des parlementaires (Madame Sublet, député socialiste, et Monsieur Peyret, député communiste) appellent "l'embauche directe" viennent contredire l'objectif officiel d'assurer la promotion de l'emploi des handicapés en milieu ordinaire. L'employeur qui dispose de procédures lui permettant de le faire en toute légalité s'oppose à la réalisation de cet objectif. De plus, toute une batterie d'arguments lui est fournie par les travaux des parlementaires. Ainsi, Le travailleur handicapé continue d'être présenté comme "augmentant les charges des entreprises" et comme un "frein à la compétitivité" de celles-ci .

Les adversaires des obligations patronales ne s'opposent pas ouvertement au projet, car il importe d'apparaître comme "faisant beaucoup pour les handicapés", leur occupation étant une "oeuvre humanitaire". Mais comme en 1924, ils luttent pour empêcher les mesures d'obligations patronales et emploient pour ce faire des termes analogues à ceux des débats antérieurs : "peu sérieux", "peu réaliste", "alourdissement des charges"... marquant à nouveau la minoration des travailleurs handicapés.

Le Député Gilbert Gantier (majorité parlementaire), parlant de la redevance versée pour défaut d'embauche, s'inquiète de la "charge nouvelle inopportune eu égard aux difficultés contributives actuelles des entreprises et à la politique (...) libérale du Gouvernement" et présente un amendement évitant que "les entreprises à établissements multiples se voient pénalisées", en décomptant séparément les succursales : ce qui permettrait à ces entreprises de ne pas dépasser le seuil de 20 salariés (16). Louis Mexandeau (député socialiste) interrompt G. Gantier: "C'est l'amendement de l'Avenue Pierre Ier de Serbie" (siège parisien de C.N.P.F.). Le Président de séance Charles Millon (U.D.F.) reproche à L. Mexandeau son manque de courtoisie mais personne ne réagit sur le fond : le handicapé reste un sur-coût à priori, plus qu'un producteur potentiel. Marie-Joseph Sublet (député socialiste) dénonce les arguments communément utilisés pour rendre compte des difficultés d'emploi des travailleurs handicapés : l'évocation de la crise alors que la situation était la même en période de plein emploi, la non-accessibilité des locaux quand les subventions d'adaptation de ceux-ci ne sont pas consommées,... Elle regrette que "... la plupart des entreprises (...) contestent le bien-fondé de textes traitant de ce problème, qu'elles situent uniquement sur un plan humanitaire" (17). Ce constat n'est malheureusement pas l'objet d'un débat préalable.

Les débats parlementaires reprennent parfois mot pour mot, les conceptions inaugurées en 1924.Faire accéder les handicapés au monde du travail reste "une nécessité absolue de solidarité nationale" dira Jean Desanlis (député conservateur), après avoir salué le Gouvernement "inspiré par des sentiments humanitaires" (18).

J. Desanlis accuse "l'exclusion sociale qui marginalise dès l'enfance" mais souligne qu'"à une époque où les entreprises licencient des personnes en bonne santé et très qualifiées, chercher du travail pour un handicapé présente de graves difficultés" (18).

S'il en appelle à la solidarité en soulignant la nécessaire intégration scolaire des handicapés, il demande qu'une distinction soit faite entre "un chômeur en bonne santé" et un handicapé dans la même situation. Cette contradiction fait de "la recherche de travail pour un handicapé" une oeuvre humanitaire, une obligation morale et non une nécessité sociale. Cette intervention n'est qu'un exemple parmi les nombreuses déclarations abondant dans le même sens : en 1987, l'emploi des travailleurs handicapés relève toujours comme c'était le cas auparavant, de préceptes humanitaires plus que de considérations socio-professionnelles.

Toutefois, une différence de taille sépare la loi du 10 Juillet 1987 de celle du 26 Avril 1924 : l'engagement du service public dans l'emploi d'handicapés. Puisque la crise économique impose un productivisme accru aux entreprises, les services publics doivent prendre en charge les travailleurs moins rentables... Les parlementaires (conservateurs et opposition confondus) relayant les pressions des syndicats patronaux et des associations d'handicapés explicitent cette position tout au long des débats. La loi du 10 Juillet 1987 réserve donc des postes de niveaux C et D dans la fonction publique, les administrations territoriales, les établissements publics industriels et commerciaux aux handicapés. Les postes de responsabilité ne sont pas soumis à l'application de ces quotas.

La société capitaliste organise la vie sociale autour d'une valeur : le travail. Personne n'échappe à son emprise ; chacun occupe une place par rapport à lui. Un chômeur ne vit pas dans un autre monde, il est "demandeur d'emploi" ; une personne âgée devient "retraitée", c'est-à-dire "ancien travailleur" ; un boursier est un "investisseur" puisqu'il finance l' outil de travail ... La métaphore devient litanie quand le travail fait figure de liturgie sociale dont l'entreprise est le temple.

Les loisirs, la culture, le sport, la vie associative, s'organisent en fonction du temps laissé par le travail. De lui, dépendent le niveau de vie, mais aussi les relations sociales et affectives de l'individu : le milieu de travail impose des circuits, des contacts, et finalement conditionne l'intégration de chacun dans la société (19). Du statut professionnel dépend le statut social. La mise à l'écart des handicapés de la sphère du travail aboutit donc à leur minoration sociale. Cette mise à l'écart passe par la séparation que, de manière constante, la législation"en faveur des personnes handicapés" opère entre le "social" (le revenu, les droits, le statut) et l'"économique". D'une part, cette législation prévoit des pensions, indemnités, allocations, revenus minimum..., d'autre part, et indépendamment, elle prend des mesures sur l'emploi : les pensions des mutilés sont fixées par la loi du 31 Mars 1919 et leur emploi par celle du 26 Avril 1924 ; l'Etat Providence inaugure l'action publique concernant l'invalidité par la loi Cordonnier du 2 Août 1949 sur l'assistance à certaines catégories d'aveugles et grands infirmes et il faut attendre le 23 Novembre 1957 pour que soit votée la loi sur les travailleurs handicapés ; si la loi du 30 Juin 1975 (qui établit l'allocation aux adultes handicapés) contient des recommendations sur l'emploi, la question n'est pleinement traitée que le 10 Juillet 1987. Cette séparation continue d'être marquée de la préférence donnée à l'assistance sur l'intégration : le statut social de l'handicapé se caractérise depuis soixante dix ans par une source de revenus indépendante du travail. Il reste socialement admis qu'un handicapé ait juste besoin d'une "occupation".

La garantie d'un revenu pour les handicapés constitue un indéniable progrès. Cependant le fait qu'elle soit au premier plan de toute argumentation sur la vie sociale de ceux-ci occulte une question plus fondamentale encore, celle de l'ouverture de la société aux gens différents, de leur insertion professionnelle,... On réduit l'enjeu du statut social des handicapés au volume monétaire de leur assistance, on répond à une question politique par une technique de gestion. Ce statut demeure l'oublié, le dénié, l'évité d'une politique sociale pensée presque exclusivement en termes d'intervention financière. Alors, l'assistance sans objectif ni finalité sociale n'aboutit qu'à une mort sociale, une assistance qui n'a plus d'autre objet que sa propre reproduction. "L'argent est un prédateur de sens" (20).

Si dans la dernière période, entre l'indépendance économique et l'assistanat, un compromis tend à s'établir, qui évite l'exclusion de l'handicapé du monde du travail en l'intégrant dans un statut professionnel, ce statut lui permet rarement de se passer de l'aide sociale. Les ateliers de travail protégés et les centres d'aide par le travail prévoient un mode de rémunération articulé avec l'assistance : le salaire qu'on y reçoit est couvert en partie par l'Etat (21), impossibilité d'accéder à des postes de prestige ou d'autorité (encadrement, direction, etc.)

Lorsqu'ils sont insérés dans le monde du travail, les handicapés restent pour la plupart dépendants de financements publics, soit par la "compensation salariale" (somme compensant la faiblesse du salaire), soit par les jeux de subventions (collectivités locales, Etat) qui permettent le fonctionnement de ce type "d'économie sociale". Leur emploi semble secondaire au regard de l'assistance, dans les politiques sociales et les pratiques administratives.

Statut social et statut professionnel sont, en ce qui concerne les personnes handicapées, comme deux parallèles (22) qui ne se rencontrent que rarement, ils maintiennent la nécessité des allocations et aides sociales. Ces dernières se substituent à l'intégration professionnelle dans une société qui préfère payer plutôt que de donner du travail, malgré l'énormité du coût financier que cela représente. Ce parallèlisme charpente le modèle culturel qui définit le handicapé par l'irresponsabilité, la pauvreté, l'isolement, l'incapacité (23). Ce sont ces mêmes critères qu'ont reproduits soixante dix ans de législation "en faveur de l'emploi des travailleurs handicapés" : postes subalternes, salaires diminués, présomption d'incapacité, lieux ségrégatifs de travail.

Au fondement de ce processus : une conception qui mélange la morale religieuse de la charité à l'humanisme républicain de la bienfaisance libérale et au coeur de laquelle la notion d'handicap est devenue un puzzle d'idées reçues, de parti-pris, de fantasmes et d'ignorances, où le paterna-lisme confessionnel et politique trouve un champ d'exercice privilégié.

A la pointe extrême de cette dérive : la mise au service de la charité publique de moyens audio-visuels importants (téléthons et autres manifestations sportives ou galas culturels destinés à recueillir des aides pour les handicapés) qui fait florès aujourd'hui. Contre cette conception qui reproduit le handicap comme objet de charité et de bienfaisance, il faut voir dans celui-ci un rapport social que doit modifier une stratégie rationnelle d'intégration professionnelle.

De ce point de vue la revendication d'un « droit à la différence » pour les personnes handicapées, soit celle d'intégration spécifique dégagée des contraintes sociales de l'efficacité et de la com-pétitivité économique, pour réaliser ur modèle culturel délivré de la comparaison dévalorisante avec les critères ordinaires de la normalité (24) paraît dangereuse.

Cette revendication a été avancée par des travailleur sociaux et certaines associations d'handicapés qui - point de rencontre de personnes marginalisées - représentent de lieux d'expression et d'échange substitutifs à un rappor social et professionnel et constituent ce que Tachon (25) appelle un « mode de régulation secondaire », une socialisation partielle désignée comme « activité occupationnelle ». Ils reproduisent le rapport social médicalisé du handicapé en spécialisant son lieu d'activité. Leur projet d'un « droit à 1a différence » est séduisant en ce siècle où vitesse et performance accentuent chaque jour les difficultés des travailleurs handicapés; mais revient à faire revendiquer la marginalisation par ses propres victimes. Le renoncement au travail qu'impliqierait ce nouveau statut, représenterait un succès pour les soixante dix ans d'opposition patronale à l'intégration des travailleurs handicapés.

REFERENCES

(1) Léon XIII : "Encyclique Rerum Navarum" Encycliques et messages sociaux éd. Dalloz, 1948, pp.73-73.

(2) cf J.O. des débats (Sénat), du 13 avril 1924, p. 862.

(3) Ibidem, p. 863.

(4) Ibidem, p. 862.

(5) Sur le processus constituant l'autorité patronale, du règlement intérieur de l'atelier au type de hiérarchie dans l'usine, voir J.P. de Gaudemar L'ordre et la production. Naissance et formes de la discipline d'usine Paris, Dunod, coll. L'oeil économique, 1982

(6) Voir sur ce point, Antoine Prost Les anciens combattants Paris, Presses de la Fondation Nationale des Sciences Politiques, 3 tomes, 1977.

(7) cf J.O. des débats (Sénat), du 13 avril 1924, p. 864.

(8) cf J.O. des débats (Assemblée Nationale), du 31 octobre 1957, pp. 4455-4456.

(9) Ibidem, p. 4458.

(10) Jean-Paul de Gaudemar, op. cit., p.44.

(11) cf J.O. des débats (Conseil de la République), du 14 mars 1957 p. 722.

(12) cf J.O. des débats (Assemblée Nationale), du 6 novembre 1956 p. 4480.

(13) cf J.O. des débats (Assemblée Nationale), du 25 juin 1957, p. 3940.

(14) cf J.O. des débats (Assemblée Nationale), du 19 Mai 1987 p. 1308.

(15) Ibidem, p. 1311.

(16) Ibidem, p. 1315.

(17) Ibidem, p. 1320.

(18) Ibidem, p. 1307.

(19) Voir sur ce point, Les cahiers du C.T.N.R.H.I., 43, juillet- septembre 1988, Kathleen Kelley, Handicap et statut d'adulte p. 14. L'auteur cite une étude d'Elisabeth Anderson mettant en évidence l'effritement des relations sociales chez les jeunes handicapés après les études, quant la vie active ne se substitue pas à la scolarité.

(20) La citation est de pascal Nicolas Le Strat.

(21) cf Code du Travail, art. R.323-59-15, D.323-25-2.

(22) cf l'intervention du Député Michel Guysel, J.O., des débats (Assemblée Nationale) du 19 mai 1987, p. 1312.

(23) La loi du 2 janvier 1968 sur les incapables majeurs institue une "tutelle aux allocations" qui concerne tous les handicapés. Elle a la louable intention de contrôler l'utilisation des allocations d'aide sociale, mais contient une présomption d'incapacité juridique.

(24) Henri-Jacques Sticker Corps infirmes et sociétés Paris, éd. Aubier- Montaigne, 1982, pp. 137 et suivantes.

(25) Tachon Travail social et gestion des problématiques in Lectures sociologiques du travail social sous la direction de F. Bailleau, N. Lefaucheur, V. Payre, Les éditions ouvrières p. 186.

Pascal Doriguzzi, Août 1989.

 

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