AVERTISSEMENT : Ce texte rédigé pendant l'été 1986 est extrait d'un mémoire que j'ai intitulé "L’État providence" et proposé comme piste de travail à mes professeurs de la Faculté de Droit et Sciences Économique de Montpellier ; à l'époque il avait semblé n'intéresser personne, tant que je circulais dans les couloirs de la Faculté avec mon petit fauteuil roulant en aluminium composite.

Ce travail a déjà 14 ans ; postérieur à la chute du mur deBerlin, il emprunte des termes, un style et des références dont le "Political Correctness" dit qu'ils sont "dépassés" (je me demande par quoi ?) et "néo-..." quelque chose. Malgré tout, je continue d'affirmer que l'héritage d'Antonio Gramsci, offert à l'avenir du fond de sa prison, reste une boussole solide pour comprendre notre monde, même en 2000 et neuf mois, et ce texte un moment utile à l'histoire des années terminant le siècle dernier. C'est la raison de sa présence sur le site.

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B. HYPOTHÈSE.

a. L’État providence est un rapport social.

1. L’État providence dans la société.

"L’État ne représente nullement une force imposée du dehors à la société". Il n’est pas davantage "la réalité de l’idée morale", "l’image et la réalité de la raison", comme le prétend Hegel (132). L’État est un produit de la société à une certaine étape de son développement ; il constitue l’aveu que notre société s’est empêtrée dans une insoluble contradiction avec elle même, qu’elle s’est scindée en antagonismes inconciliables, dont elle est impuissante à se débarrasser. Mais pour que ces antagonismes ,ces classes aux intérêts économiques contradictoires, ne se dévorent pas et ne dévorent pas la société dans une lutte stérile, une force est devenue nécessaire, qui, placée en apparence au dessus de la société, modérerait le conflit, le maintiendrait dans les limites de "l’ordre". Cette force issue de la société, mais se plaçant au dessus d’elle et s’en éloignant de plus en plus, c’est l’État. (133).

Le terme "luttes de classes" évoque les deux classes antagonistes, la bourgeoisie détentrice du capital, et le prolétariat possesseur de la force de travail. Cette division fondamentale représente l’équilibre général de la société. Mais le contenu et le moteur de la lutte des classes est à chercher dans l’hétérogénéité des classes. La bourgeoisie n’existe que comme somme d’intérêts matériels opposés les uns aux autres dans la concurrence pour l’hégémonie économique et politique. On ne peut considérer le terme "somme" comme addition de fractions de classes, mais plutôt comme confrontation. Cette opposition permanente entre les capitalistes réalise l’équilibre de la classe. Celui-ci à son tour permet la domination de la bourgeoisie dans son ensemble sur toutes les autres classes (par exemple, le phénomène de l’intégration verticale dans le processus de la concentration monopoliste révélé une lutte entre les petits capitalistes destinés à devenir sous-traitants, et les sociétés monopolistes. ) Cette dynamique interne est une force centrifuge. Seule l’unité des fractions entre elles permet l’équilibrage de l’ensemble de la société par la classe dominante. L’unité de la classe pour la préservation et la reproduction de la société est assurée par l’État. Il est le lieu où se confrontent les divergences d’intérêts, qui sans lui feraient exploser la société. L’État capitaliste placé au dessus de la société constitue une médiation entre les classes et fractions de classes: Il canalise les rapports des intérêts particuliers grâce à un ensemble de réglés et institutions auxquelles sont soumises toutes les classes de la société. (134). "L’État capitaliste doit être considéré comme un rapport, plus exactement comme la condensation matérielle d’un rapport de forces entre classes et fractions de classes, tel qu’il s’exprime, de façon spécifique au sein de l’État" (135).

L’État n’est pas une chose neutre, passive, manipulée par une classe ou fraction de classe, et privée de toute autonomie. Cette conception de l’appareil d’État constitue la théorie d’un État - instrument au service de la fraction au pouvoir. Le Parti Communiste Français utilise cette version jusqu’au milieu des années 1960 au sujet du capitalisme monopoliste d’État. Il n’est pas plus un "sujet" comptable de sa seule volonté, instance rationnelle au dessus de la société. La moralité objective de Hégel fait de l’État une sphère autonome où ses serviteurs sont censés détenir le secret de la rationalité. Il est un rapport entre des contradictions qui en s’exprimant librement, mais dans le cadre légal, constituent un lieu de compromis unifiant les oppositions. Il est un rapport d’extériorité à la société, en ceci qu’il est un produit. Mais il est intériorité en ce qu’il constitue le terrain commun aux classes qui constituent la société capitaliste. L’État est l’axe central d’un faisceau de forces à relations catastrophiques. Il permet ainsi aux antagonismes de rester solidaires dans leurs oppositions. Ce faisant, il donne sa forme à la société en assurant la pérennité de la division sociale en classes. L’État est le produit de la société civile, et la condition de sa reproduction. À ce titre, l’État représente "l’intérêt général". L’équilibre catastrophique des classes est un lieu de compromis entre les fractions luttant pour la domination des autres couches dans la classe. La fraction dominante de la bourgeoisie définit "l’intérêt général".

Antonio Gramsci entend par concept "d’égémonie" le moment (mouvement) dans lequel la constitution des intérêts politiques des classes par rapport à l’État représente l’intérêt général. Gramsci pense la constitution d’une classe comme le dépassement de la conception corporatiste d’un groupe purement économique. C’est le moment où les idéologies deviennent "partis". Ceux-ci entrent en lutte jusqu’à ce qu’un d’entre eux devienne déterminant sur l’aire sociale. Son propre intérêt s’impose comme l’intérêt général, non sur le plan corporatif, mais sur le plan "universel". L’État est un continuel dépassement d’équilibres instables entre les intérêts du groupe dominant et ceux des couches subordonnées (136). Le concept d’hégémonie chez Gramsci ne signifie pas la mise en avant d’intérêts particuliers, mais bien la domination des valeurs culturelles, éthiques, les conceptions d’universalité de la fraction dominante. Nicos Poulantzas révèle un autre sens de l’hégémonie. L’État et la lutte des classes forment un "bloc au pouvoir", c’est à dire un cartel de fractions exerçant le rôle hégémonique. "Mais parmi ces fractions au pouvoir, l’une d’elles joue un rôle dominant hégémonique. La classe hégémonique est celle qui concentre en elle, au niveau politique, "la double fonction" de représenter l’intérêt général du peuple - nation et de détenir une dominance spécifique parmi les classes et fractions dominantes, et ceci, dans sa relation spécifique avec l’État capitaliste. " (137)

La théorie de l’État - chose fait de la politique de l’État, l’expression des besoins de la classe hégémonique. Il ne possédé aucune autonomie par rapport à elle. La théorie de l’État - sujet dote l’État d’une volonté autonome par rapport aux classes. Sa politique se décide indépendamment de la société civile. Ces deux thèses font l’impasse sur les contradictions internes à l’appareil d’État et la fixation de sa politique. Elles traitent l’État comme un monolithe où les contradictions ne sont que les fruits d’événements propres à la société civile. Hors, la politique de l’État est organiquement liée aux événements qui traversent la société civile ; ce sont elles et les compromis entre fractions de classes qui accouchent de la politique de l’État. "La politique de l’État doit être considérée comme la résultante des contradictions de classes inscrites dans la structure même de l’État." (138). La lutte pour l’hégémonie construit l’équilibre dans l’État. Elle réalise une adhésion des fractions subalternes de la classe dominante. L’hégémonie correspond à la définition de la politique de l’État. Le parti hégémonique doit "... créer une unité non seulement sur les objectifs économiques et politiques, mais également une unité intellectuelle et morale, et poser toutes les questions qui surgissent, non pas au niveau corporatif, mais au niveau l’universel". Il exerce "une coordination concrètes avec les intérêts généraux des groupes mino-ritaires" (139). Ces rapports de la fraction supérieure avec les couches subordonnées du bloc au pouvoir, ainsi qu’avec les classes dominées, posent la question du consentement à l’hégémonie politico - économique et à ses valeurs d’universalité. Ralph Miliband fait peu de cas de la notion de consentement. Les rapports entre classes dominantes et classes dominées se résument à deux opérations simultanées. Pour répondre à la pression sans cesse renouvelée de la lutte des classes, l’État entreprend des réformes limitées aux cadres politiques et sociaux correspondant aux intérêts universels de la fraction hégémonique. A ces mesures s’ajoute un politique de répression d’autant plus importante que la concentration économique moderne restreint la base sociale de la classe dominante . Miliband prétend les classes dominées capables de refuser ces politiques, et en même temps admet la montée, sinon du fascisme, du moins de "formes plus ou moins prononcées d’autoritarisme" (140). Hors, le fascisme comme toute politique autoritaire, nécessite un consentement des classes dominées, du moins une passivité. Les rapports de la lutte des classes et de l’État ne peuvent faire l’économie du type de négociations, d’intérêts, de compromis passés entre les fractions déterminant la société et la politique du pouvoir. La question du consentement est première pour le capitalisme moderne.

Gramsci définit la coercition comme élément de la combinaison coercition - consentement constituant la fusion de l’État et de la société civile (141). Il estime spécifique le consentement développé par la société capitaliste. Dans la mesure où la société politique (l’État) et la société civile sont fusionnées, le pouvoir coercitif s’y répand sous forme de lieux et de fonctions culturelles et économiques multiples (écoles, entreprises privées, justice...) Le consentement joue un rôle régulateur dans la société capitaliste. Nicos Poulantzas rejette la conception de Gramsci sur le consentement en affirmant que celui-ci a comme particularité le rationalisme et la négation du caractère religieux de l’idéologie : "... le caractère spécifique de ces idéologies n’est nullement comme le croyait Gramsci, de provoquer un "consentement" plus ou moins actif des classes dominées à l’égard de la domination politique : ceci est une caractéristique générale de toute idéologie dominante. Ce qui spécifie les idéologies en question, c’est qu’elles ne visent pas à être reçues par les classes dominées sur le mode de la participation au sacre: elles se donnent explicitement, et sont reçues, comme techniques scientifiques" (142). Nicos Poulantzas a raison sur le fait que le type de participation dans le mode de production capitaliste ne doit plus au sacré. Par contre, il dépend explicitement de la croyance en l’égalité de tous les citoyens dans le système parlementaire. Cette croyance n’est pas autre chose que "la négation de l’existence d’une classe dirigeante." (143)

Le consentement des classes dominées à l’égard de la domination politique est possible dans la société capitaliste moderne, du fait que les dominées sont persuadés de leur possibilité d’expression dans le cadre de l’unité nationale, et du pouvoir, qu’a "le peuple" de peser sur la politique de l’État. "Le peuple" est une illusion noyant toutes les différences, de classes dans une citoyenneté discursivement égalitaire. Il est l’occultation de l’hégémonie comme politique dans l’État, et la disparition de l’idée de classe dominante. "Ce qu’il y a de nouveau dans la forme de ce consentement, c’est fondamentalement que les masses sont persuadées qu’elles exercent une suprême autodétermination au sein de l’ordre social existant" (144). Perry Anderson comprend le concept de consentement comme un élément idéologique abstrait lorsqu’il affirme que "la persuasion" des populations est la caractéristique de celui-ci. Il s’agit de l’effet du parlemen-tarisme et de la participation de classes dominées au système représentatif. La conséquence est le sentiment des couches populaires de peser réellement sur la politique de l’État, et d’exercer un contrôle sur celui-ci. Le consentement dans une formation capitaliste moderne produit des accords réciproques entre dominants et exploités. Cette croyance dans l’égalité démocratique s’accompagne de l’acceptation de la division de la société en classes, de ses hiérarchies, de la domination. Les "techniques et les sciences" dans le cadre de la société capitaliste, constituent les moyens et les limites du possible pour l’exercice de l’hégémonie et la politique de l’État. L’existence de cette classe dirigeante est vécue comme une nécessité technique dans un monde accepté tel quel par les dominés. Perry Anderson pense que le caractère religieux de la croyance s’apparente à la déférence moderne en la science : le peuple admet la distance entre la volonté et la réalisation par ses représentants tant qu’il lui semble que " c’est lui-même qui définit les bornes de ce qui est socialement possible" (145).

La différence entre les thèmes défendus par les élus et la pratique effective de la politique de l’État (de la classe hégémonique), est admissible parce qu’elle semble justifiée par des limites techniques objectives. "Une croyance réelle et primordiale en la souveraineté populaire peut, en d’autres termes coexister avec un profond scepticisme vis à vis de tous les gouvernements qui l’expriment" (145). Perry Anderson considéré l’aspect idéologique comme moteur du consentement. Certes la persuasion, la croyance, l’occultation de la différence entre "ce qui semble" et "ce qui est", jouent un rôle considérable pour le fondement du consentement dans l’État moderne. Mais l’État moderne démocratique n’est pas qu’un voile d’illusions tendu entre "le peuple" et les décisions politiques du bloc au pouvoir. La spécificité du consentement dans l’État moderne, c’est la prise en compte par l’État des contradictions posées par les classes dominées à la société capitaliste, dans l’élaboration de sa politique. "La politique de l’État est la résultante des contradictions de classes inscrites dans la structure même de l’État" dit Nicos Poulantzas. L’État libéral est le produit d’une adhésion des fractions subalternes du bloc au pouvoir à la politique de la fraction hégémonique Cette adhésion s’obtient par intégration - négociation des intérêts de fractions subalternes de la classe dominante, à ceux de la fraction hégémonique. L’État providence intègre les contradictions des classes dominées dans les négociations et les compromis qui construisent son équilibre. La lutte pour l’hégémonie est toujours le moteur de la politique de l’État. Mais en plus de l’adhésion des fractions subalternes de la classe dominante, elle détermine des enjeux et des compromis avec les classes dominées dans la fixation de la politique de l’État. L’État providence réalise des reconnaissances mutuelles :

- Reconnaissance des intérêts et acquis fondamentaux des classes dominées (sécurité sociale, droit du travail, salaires minimums, etc.), comme valeurs universelles par la fraction hégémonique et tout ou partie des fractions subalternes de la bourgeoisie.

- Reconnaissance par les classes dominées de l’unité morale, intellectuelle et universelle de la fraction hégémonique, dans les questions constituant la politique de l’État. Cette dernière est une coordination concrète avec les intérêts généraux des groupes minoritaires, et ceux des classes dominées.

En échange, "le peuple" et ses représentants intègrent le critère idéologique de la science comme borne technique de ce qui est socialement possible ; autrement dit, l’inexistence d’une classe dirigeante - donc de la société de classes - est reconnue comme valeur universelle. "La particularité du consentement historique des masses au sein des formations sociales du capitalisme moderne" (146), ne réside pas dans la laïcité et le respect de la science (Poulanzas), ni dans le credo idéologico - intellectuel des citoyens en l’égalité démocratique (Perry Anderson). Ce qu’il y a de nouveau n’est pas dans la forme, mais dans le fond : de la seconde guerre mondiale à la crise des années 1970-80, l’État providence est le lieu de confrontation d’intérêts de classes et de compromis entre elles. Les classes dominées sont parties prenantes dans l’élaboration des politiques de l’État. Elles s’intègrent à l’économie libérale, mais bénéficient de la mise en oeuvre par l’État de politiques favorables à la réalisation de revendications sociales (scolarité, santé, pouvoir d’achat, libertés publiques...) C’est en réalisant des politiques sociales concrètes que l’État devient "État providence". Il n’est que l’aspect pratique du compromis idéologique entre la fraction hégémonique et les classes dominées. A partir de là, il peut être traité en "État - sujet", organe technique dont le rôle est la création de règles juridiques en direction des problèmes sociaux et politiques (aide sociale, droit du travail, légalisation des conflits... (147).

Le consentement des classes dominées dans l’État providence, dépend d’une intégration du rôle politique de celles-ci dans l’État, d’un processus de légitimation débouchant sur des politiques répondant aux aspirations des couches populaires. Enfin, il établit une pratique de l’État épousant la définition de l’État - sujet pour qui la science et la technique font partie de l’appareil idéologique d’État. "... le fonctionnement concret de son autonomie et l’établissement de sa politique (de l’État) ... dépendent également, et même surtout, du rôle de l’État à l’égard des classes dominées" (148). L’État reproduit l’hégémonie en intégrant certaines fractions des classes dominées. Il passe avec elles des compromis, qui les mettent en relation avec le bloc au pouvoir. Il organise la division entre fractions des classes dominées, en polarisant leurs intérêts vers les fractions subalternes de la bourgeoisie. La classe hégémonique impose bien souvent des compromis partiels à ses alliés subalternes, avec des couches dominées. Cela permet de cantonner les organisations politiques des classes dominées dans un statut discursif sans poids réel dans la réalisation sur le terrain des politiques de l’État providence à l’égard de ces couches dominées.

L’État n’est pas extérieur aux groupes dominées. De même que la lutte entre fractions du bloc au pouvoir est le moteur de la politique de l’État, les luttes des classes dominées imprègnent l’appareil d’État. Ces luttes ne sont pas "hors pouvoir". Les institutions publiques ou privées répondent aux mouvement sociaux par des compromis où s’enlisent ces conflits. Les effets de ces négociations sont parcellisés et institutionnalisés par l’État providence. L’aboutissement est le "désamorçage" de la signification politique des revendications populaires, en leur donnant un débouché institutionnel conforme au fonctionnement de la société capitaliste (en matière de santé, par exemple). Les contradictions du bloc au pouvoir s’avivent dans ces compromis. Les rapports entre les intérêts de la classe hégémonique et telle ou telle fraction dominée se réalise parfois au détriment de telle ou telle fraction du bloc au pouvoir (accords salariaux, par exemple).

L’intérêt général du bloc au pouvoir est la reproduction de la société divisée en classes. Mais dans cette équation fondamentale, les attitudes de chaque fraction de ce bloc ne sont pas les mêmes vis à vis des classes dominées ; chacune lutte contre ses alliés en vue de compromis favorables à ses intérêts (les dispositions favorables à une catégorie de salariés peuvent assurer le calme social dans une branche d’activité, mais accentuer la hausse des coûts de production pour les petits capitalistes). "Les différences tactiques ou même de stratégie politique face aux masses populaires, sont un des facteurs primordiaux de division au sein du bloc au pouvoir lui-même." (149). Le rapport joue aussi dans le sens des appuis d’une fraction sur une couche dominée dans la lutte contre les alliés de classe. L’établissement de rapports de clientélisme entre les dominants et les dominés approfondit la division des entre ceux-ci et donne à la fraction partie prenante au marché, un argument pour faire peser en son sens les compromis qui s’inscrivent dans la matérialité institutionnelle de l’État. Ces phénomènes intégrant les classes populaires dans l’État n’ont rien à voir avec un double pouvoir qui transformerait la nature de l’État (150). Les rapports entre le pouvoir et les classes dominées reproduisent les positions sociales dans la hiérarchie de l’État. L’État providence élargit les rapports du bloc au pouvoir avec les classes dominées, mais ne donne pas de pouvoir à celles-ci. La présence de rapports constituants entre ces intérêts fondamentaux existent depuis l’État moderne.

Ce qui est nouveau avec l’État providence, c’est l’accord hégémonie - dominés sur un concept idéologique d’universalité, incluant les intérêts spécifiques des classes dominées dans le système capitaliste. (Les remboursements des frais de santé par la sécurité sociale sont le résultat de luttes populaires et d’expériences patronales de l’industrie, mais se réalisent dans le cadre d’une médecine libérale. Les interventions de l’État ne font que centraliser le potentiel libéral - recherche - infrastructure hospitalière, et aussi palier aux besoins des plus nécessiteux.) L’État libéral réalise sa légitimation politique sur la base d’un système d’universalité, le suffrage universel, l’État providence double son processus de légitimation, en palliant aux carences de l’économie de marché. Il améliore le système scolaire, la santé, le logement; il amortit les conséquences négative de la production privée : aide aux chômeurs, lutte contre les nuisances collectives... La conception de l’universalité dans l’État providence, est constituée d’un processus de légitimation persuadant les foules qu’elles exercent une suprême auto-détermination sur l’ordre social existant (15I) par le suffrage universel ; un autre processus de légitimation répond à certains besoins de classes dominées, et les inclut dans les conceptions idéologiques dominantes. Jürgen Habermas estime l’interventionnisme en faveur des classes dominées comme le soucis pour l’appareil d’État "de faire naître et améliorer les conditions d’exploitation du capital accumulé" (152). Les interventions de l’État ont pour raison la nécessité pour le système d’obtenir des conditions satisfaisantes de reproduction de la force de travail (santé, loisirs...), de disposer d’une main d’oeuvre qualifiée, (scolarité) de transcroître les marché de consommation publique. Bien entendu, ces préoccupations résident dans la fixation de la politique de l’État. Mais il faut les considérer comme le résultat d’une confrontation au sein de l’appareil d’État des besoins du système exprimés par des fractions du bloc au pouvoir (notamment la fraction hégémonique), et des revendications posées par les classes dominées, au cours des luttes traversant l’appareil d’État. À cette condition la représentation des acquis sociaux par Jürgen Habermas est juste.

2. La crise de l’État providence.

"Historiquement, les mouvements ouvriers et socialistes ont été la principale force motrice du développement des formes démocratiques dans les sociétés capitalistes" (I53). Ralph Miliband traite la question sous forme de progrès politiques et sociaux produits de l’affrontement Pouvoir - Prolétariat. Les acquis sont arrachés par la lutte des classes dominées contre la bourgeoisie. Certes, sans ces luttes, les règles sociales au sein de la société auraient un visage très différent. Mais son fonctionnement requérant un traitement publique de questions laissées jusqu’ici à la sphère privée, les politiques de l’État dans ces domaines ne sont qu’un passage obligé du développement. Le mouvement ouvrier est lui-même le produit de la société bourgeoise. Il en est à la fois le matériel économique et la contradiction politique.

Chaque stade de transformation du capitalisme a des effets sur l’existence de la classe ouvrière. Habermas pense que les conquêtes sociales correspondent aux besoins organiques du capitalisme, besoin de reproduction de l’outil humain, besoin de légitimation politique. Les demandes exprimées par les classes dominées à un moment donné, correspondent à un moment de sa gestation. Cette demande exprimée par les dominés sous forme de luttes sociales est confrontée aux intérêts dans la classe dominante, luttant entre eux pour l’hégémonie. L’État providence répond à cette nécessité commune à certaines fractions de la classe dominées. Ralph Miliband sous-estime la capacité de la bourgeoisie à se transformer. Ce ne sont pas tant les dirigeants sociaux-démocrates qui intègrent le mouvement ouvrier dans les structures du capitalisme, que l’intervention positives de l’État providence sur le terrain des luttes sociales. En répondant à des demandes de prise en compte des revendications des classes dominées, l’État occupe le terrain politique de la social-démocratie. Celle-ci n’a d’autres choix qu’une démarche d’alliance au sein de l’appareil d’État, avec les fractions de la classe dominante porteuse d’intérêts compatibles à ceux qu’elle représente. Elle se confond avec le "walfare state" en tant que gestionnaire des conflits, pour réaliser ces compromis de classes dans l’État.

Lélio Basso évalue la social-démocratie suédoise comme déstabilisation des formes pré- capitalistes du mode de production, la transformation des couches rurales. "... l’alliance entre grand capital et mouvement ouvrier apparaît alors comme la plus sûre sauvegarde du systéme." (I54). Le grand capital ne peut plus passer d’alliance avec les couches traditionnellement acquises, car elles sont déstabilisées par les mutations dues à la trans-croissance des forces productives. L’État providence est une alliance à un moment donné entre des fractions de la classe dominante et le mouvement ouvrier. "Naturellement, cette collaboration suppose une répartition des devoirs, qui en Suède, s’opèrent à peu prés ainsi : la social-démocratie fournit au grand capital la base de masse nécessaire à un régime moderne fondé sur le suffrage universel, et reçoit en échange non pas le pouvoir, mais simplement l’exercice de la fonction gouver-nementale, limitée d’ailleurs et contrôlée par la fonction hégémonique qu’exercent sans réserve le grand capital et les intellectuels à son service." (155).

La crise de l’État providence est une rupture du compromis entre l’hégémonie au pouvoir et le mouvement ouvrier. Les deux parties au contrat sont en mutation du fait de la suraccumulation du capital et de ses conséquences :

-La bourgeoisie connaît une baisse réelle de ses taux de profit partir de la crise de 1974. Celle-ci oblige les fractions du bloc au pouvoir à redéfinir leurs rapports entre elles et par conséquent avec les classes dominées. Les rapports entre fractions de la bourgeoisie se modifient au point de donner lieu à des restructurations dans les mécanismes de la. Concurrence (faillites, interventions sélectives de l’État, nouvelles concentration - restructuration d’entreprises, introduction de nouvelles technologies dites de la troisième révolution industrielle... Ces phénomènes donnent naissance à de nouveaux rapports entre la classe hégémonique et les fractions dominées (sous-traitants, PME, concessionnaires de service...) Le type de traduction par l’État des rapports sociaux repose désormais sur la recherche par la classe hégémonique de nouvelles alliances assurant : la reproduction de la domination de classes dans le cadre de l’économie de marché ; le rétablissement du taux de profit, notamment grâce à un processus de modernisation de l’industrie(informatique, robotique, génétique, diminution systématique des concentrations ouvrières, introduction de procès de production à faible main d’oeuvre).

- La crise capitaliste décompose la structure des classes dominées afin de réhabiliter le taux de profit des investissements. Alain Touraine constate les modifications des procès de production et la décomposition du monde du travail imposées par le progrès technique (I56). Les ordinateurs, les robots, les procès de synthèse (industrie chimique) demandent une main d’oeuvre d’entretien et de petites unités de services. Ce nouvel ordre industriel défait la figure classique de l’O.S., en utilisant de petites entreprises sous-traitantes pour le contrôle et la maintenance des appareils (I57). Le nouvel ordre productif n’investit plus dans de grandes unités à forte concentration de main d’oeuvre. Il réalise une forte productivité, c’est à dire qu’il produit plus et plus vite, mais avec peu de personnel. Il nécessite l’emploi d’équipes de service, formées d’employés au statut précaire, le pus souvent issus d’entreprises intérimaires (158). La société capitaliste vit déjà le dualisme, mais pas dans le sens "d’adieux au prolétariat" (159). Le dualisme est la différence entre ceux qui sont intégrés au processus organique de production (ingénieurs, cadres, techniciens...) et ceux qui ne participent qu’au processus périphérique (Les intérimaires, hors statuts, hors cadres...)

La société capitaliste recompose la classe ouvrière selon les besoins de la troisième révolution industrielle. Elle façonne un nouveau prolétariat dont la définition statutaire est plus proche de celle des années 1910 que des années 1960. Elle formule de nouvelles alliances de classes, mais en aucun cas elle ne remodèle la structure de classes du capitalisme moderne. L’État ne réalise plus la reconnaissance mutuelle dans le cadre de l’idéologie bourgeoise. Il n’intègre plus les intérêts des classes dominées dans la définition sociale de l’universalité *. La restructuration de la société la montée du chômage, la précarité des statuts et du droit du travail, sont les conséquences de la rupture par la classe hégémonique des liens tissés, notamment avec la classe ouvrière, et sa tentative de passer de nouveaux accords, notamment en élargissant le champ des couches moyennes (ingénieurs, cadres, techniciens, nouveaux entrepreneurs, professions libérales... Le suffrage universel subit un transfert de fonction : d’intégrateurs politique des intérêts des classes dominées à la société capitaliste, il devient réalisateur de l’adhésion des dominés à une universalité où leurs intérêts de classe ne sont plus reconnus comme valeur constituante.

A. Les bornes objectives du possible...

L’État providence intègre les classes dominées en répondant à leurs revendications par des politiques sociales compatibles avec l’économie de marché. Les demandes formulées sont traitées comme des problèmes à résoudre dans un cadre donné. Les limites et la forme des réglés politiques et administratives en questions sont déterminées par l’État en tant que "bornes objectives de ce qui est socialement possible" (160). L’État providence transforme considérablement l’idéologie. Il intégré au système de pensée politique la notion de rationalité. Au dessus des opignons et des pratiques sociales, il y a une limite objective aux choix, celle de la science et de la technique. Cette présentation écarte délibérément la question de la domination : "Les rapports de production existants sont présentés comme les formes d’organisation techniquement nécessaires. " (161), mais présentés par qui? Et à qui? Nécessaires à qui? - répond l’État providence. Il répond aux questions sociales par des techniques politiques et juridiques objectivement limitées par les contraintes financières, l’organisation du travail, la concurrence. Mais les contraintes techniques ou scientifiques ne limitent les décisions politiques que dans le cadre d’un type de rapports rationnellement définis. "La "rationalité" est édulcorée en tant qu’échelle de la critique et ravalée au rang d’un simple correctif à l’intérieur du système" (162).

Aux insuffisances du système, l’état providence répond par la volonté d’un mieux faire, d’un faire plus améliorant ou créant des réglés et des techniques reconnaissant implicitement :

- L’universalité du système social mis en oeuvre au niveau décisionnel. Répondre aux questions de la société par la technique revient à enfermer le "Pourquoi ?" dans le "Comment ?", ou à justifier le "Pourquoi ?" par le "Comment ?". La technologie fonctionne comme élément unifiant de la société. Elle est la justification de la hiérarchie, des priorités à un moment donné, qui encadrent et dirigent le système capitaliste. Elle est la négation de la division en classes comme forme de domination, de la division sociale du travail, puisqu’elle se présente comme division technique. L’hégémonie politique dans l’État providence prend les traits de la rationalité. Elle perd la formulation avouée d’un titre de propriété. Le système social n’est plus celui de la classe au pouvoir mais celui d’une rationalité universelle.

- Hors, la technique n’existe que dans un cadre défini. La pratique à laquelle elle est destinée constitue déjà le choix de sa finalité. Plus qu’un simple cadre, la technique est la forme politique de la société. Elle en induit le sens. Pour autant, une modification technologique ne modifie pas la société. Elle n’est elle-même que le fruit du développement des capacités productives à un moment donné. C’est la société qui produit la science. Mais aujourd’hui, c’est la science qui est devenue la finalité de la société. Si elle remplace l’idéologie comme moyen d’unification de la société, c’est parce que celle-ci n’a plus d’autre finalité que sa propre reproduction. La forme idéologique de la science et de la technique est la traduction politique de la domination de la classe hégémonique dans l’État capitaliste moderne. La foie en la modernisation est un terrain d’entente entre le néocapitalisme et la social-démocratie telle qu’elle s’est définie au congrès de Bad Godesberg (social-démocratie allemande) : le plus efficace, le plus moderne, le plus capable de gouverner la société capitaliste (163).

B La légitimation par la technologie des choix politique.

La rationalité n’est pas remise en cause par la crise de l’État providence En effet, la domination de la rationalité fait de l’augmentation des forces productives le fondement de sa propre légitimation (164) La rentabilité et l’efficacité technique servent de critère de la rationalité, justifiant le pouvoir sans qu’il lui soit besoin de démontrer une autre finalité à sa mise en oeuvre. Le moyen ne justifie que le moyen. Ainsi, le démantèlement d’une entreprise a comme objectif la mise en service d’unités de production plus rentables, au bénéfice de la technologie, au détriment de la main d’oeuvre. Ce changement de moyens de production adapte la technique à la technique sans poser la question de la finalité de la concurrence, son rôle réel dans la décision, et de sa signification politique. La technique et la science sont aujourd’hui l’expression des intérêts de la classe hégémonique, au sens Gramscien du terme. Elles sont le discours politique de la société capitaliste, la raison rationnelle de la raison d’État. Le compromis de classes générant l’État providence cédé à la crise de transformation des classes. La rationalité comme critère politique est plus que la forme de l’État: elle est le fond de la société.

a. Le nouvel espace social : la crise de l’aide sociale.

Mobilité de l’emploi et adaptation, formation permanente et réinsertion professionnelle font désormais partie d’un discours sur le travail, contribuant à fonder le mythe d’un "salariat post-moderne" (165). La remise en cause des lois sociales au nom du dynamisme et de l’efficacité, constitue l’intégration dans le discours idéologique de la rationalité, aux intérêts de la classe hégémonique. Ceux-ci sont présentés comme des nécessité techniques liées à la concurrence et diverses "réalités" du marché. L’augmentation du chômage est parallèle à une précarité des conditions de travail, l’ensemble réduisant le coût de la main d’oeuvre et réhabilitant le taux de profit (166). Les conséquences sociales de cette insécurité permanente résident surtout dans le changement d’attitude vis à vis des salaires indirectes : allocations familiales, de chômage, aide sociale... D’acquis sociaux appendice du revenu, ils deviennent constituants du salaire réel, dans la mesure où ils contribuent désormais à la compensation sociale d’un dénigrement professionnel. Ils sont le pendant de "petits travaux" intérimaires, précaires, qui permettent d’assurer un niveau minimum de consommation, sinon de survie. Certaines catégories n’ont d’autres ressources pour assurer les transitions entre deux salaires que l’aide sociale. Il en résulte que "à un titre ou à un autre, toute la population est concernée par l’aide sociale" (167). Ce nouveau rapport des classes dominées à l’aide sociale de l’État tourne dans un cercle vicieux: . Le nombre accru de demandeurs d’aide diminue d’autant les rentrées fiscales alimentant l’aide sociale... La diversité des situations engendrées par la crise accroît la demande d’intervention de l’État. Antoine Lion et Pierre Maclouf dirigent les travaux sur le rapport "FORS." établi en 1980, à la demande de la Communauté Economique Européenne par la fondation pour la recherche sociale, ainsi que le rapport "OHEIX." de 1981 sur la précarité et la pauvreté (168). Les auteurs analysent les phénomènes de développement de la pauvreté. Ils proposent une série d’éléments pour délimiter les critères de pauvreté, de handicap social, les difficultés des institutions confrontés à des problèmes qui les dépassent: les nouvelles populations demandeuses n’entrent pas dans les définitions qui servent d’étalon à l’action sociale (169). La pauvre -té est elle une marge ou un élément constitutif de notre société ? Lion et Maclouf distinguent trois aeges (170) :

a. Les pauvres ne sont qu’un retard de l’ascension générale de la société. Ils disparaissent avec le développement de la consommation de masse, et subissent un processus d’intégration à l’enrichissement. La solution est une question de temps. C’est le discours des années 1950.

b. Les pauvres sont une partie normative de la société. Ils sont une marge constitutive du capitalisme moderne, les ratés inévitables du système. L’aide sociale est le versant naturel d’une pauvreté acceptée, engendrée par l’ordre social. Le remède est une adaptation progressive des populations pauvres. Ce sont les années 1965-75.

c. L’existence et le développement de la pauvreté sont nécessaires pour garantir la reproduction d’un système social structurellement inégalitaire, doctrine vérifiée par la crise des années 80, et la montée du chômage comme antidote à la crise du capital. La précarité des statuts et des conditions d’existence dépend de la place occupée dans les rapports de production, dans l’utilité des couches sociales pour l’investissement et les objectifs des classes dominantes.

Dans ce cadre, il n’y a marginalisation que par rapport aux stratégies des classes au pouvoir. La pauvreté ne marginalise pas ses victimes. Elle les intégré dans un processus de reproduction et de conservation de l’ordre social. Des relations inégalitaires supposent la participation à un champ social commun. Ce champ reconnu permet la fixation d’une échelle de valeur en fonction des capacités d’insertion dans le système productif (rentabilité). La crise de restructuration capitaliste fonde une nouvelle pauvreté. Elle est plus nombreuse, plus jeune, revêt des formes plus variées qu’auparavant (171). Les institutions de l’État providence s’avèrent incapables de répondre à des problèmes de masses, faites qu’elles sont pour traiter des cas individuels. Elles tentent de répondre en aménageant leurs moyens aux définitions de ces populations: (DDASS. et classement des pauvres dans des typologies identifiables (par exemple, le handicap (172) Michel Tachon, collaborateur de "L’insécurité sociale", avance trois éléments pour une réponse sociale (173) : solidarité, réorienter une part de la masse des transferts en faveur des plus pauvres ; l’emploi, la nouvelle pauvreté est le chômage d’hier prorogé aujourd’hui, alors que le gonflement des sans emplois asséché les ressources de l’aide sociale ; décentralisation, les institutions locales peuvent jouer plus facilement sur les populations à aider, grâce à une meilleur connaissance de celle-ci (vingt ans après que reste-t-il de nos amour ?). Les mesures envisagées entrent en contradiction avec la question posée par l’insécurité sociale. Elle reconnaît la pauvreté comme condition de reproduction d’un système social structurellement inégalitaire. Les structures responsables de ce fonctionnement social reproduisent les couchent défavorisées en même temps que la société inégalitaire. "Réorienter la production" dans le cadre de l’économie de marché revient à cons-truire de nouveaux compromis entre les couches populaires et la fraction hégémonique .

Mais sur quelle base construire un rapport réhabilitant le taux de profit tout en redonnant vigueur à l’État providence? La formulation politique d’un tel projet idéologique se heurte à l’antagoniste des deux termes de l’équation : la transformation des procès "classiques" de travail et de leur environnement social (droits acquis, protections diverses, etc.) sont les moyens de la réhabilitation du taux de profit. Michel Tachon traite les effets de la crise (la pauvreté), mais il n’attaque pas ses causes (une société structurellement inégalitaire). De plus il ne lie pas la pauvreté à la forme sociale et la dépendance de celle-ci au développement de ses conséquences. La résorption du chômage et de la nouvelle pauvreté ne pourrait que modifier la forme à l’intérieur de la classe dominante par ses relations avec les classes dominées. L’humanisme des initiatives pour aider les victimes de la nouvelle pauvreté ne peut dépasser le stade de la charité publique, à cause de l’inadaptation de la réponse à la question de l’État providence et des rapports de classes qui produisent la pauvreté.

b. La reconnaissance de l’inégalité.

La crise de l’État providence substitue la rentabilité financière au principe d’égalité qui animait son action. Elle fait passer l’emploi et les conséquences sociales du chômage après les préoccupations monétaristes et les grands équilibres budgétaires, conformément à une politique libérale en temps de crise. Le IX° plan ne fait pas de l’emploi la priorité "Faut-il faire de l’emploi une priorité économique commandant aux autres grands équilibres, ou bien, les priorités étant ailleurs, s’efforcer de les gérer socialement ?". (174). Le plan veut rétablir l’équilibre extérieur et la modernisation de l’appareil productif, afin de rendre possible de nouvelles relances dans les domaines sociaux. "L’impératif immédiat de redressement des échanges extérieurs, et celui de la reconstruction des bases de la croissance nécessitent en début de période, un effort de modération de la consommation. Mais cet effort (...)permettra de créer des postes de travail plus nombreux, plus qualifiés et de produire davantage de richesses." (175). L’emploi n’est plus l’axe économique. Il devient une matière de gestion sociale s’accommodant des cadres socio-politiques de l’économie de marché. Dés lors, l’État ne remédie qu’aux effets de la crise en accompagnant les licenciements massifs de "plans sociaux" indem-nisant les victimes, accélérant les procédures de mises à la retraite et les stages parking... L’effet sur l’emploi est un dénigrement des lois sociales et des conditions de travail, ainsi que l’accentuation de phénomènes de stratification des classes dominées. "... il s’agît pour le capital de mettre en place une nouvelle gestion et de nouvelles conditions de reproduction de la force de travail fondées sur une stricte adaptation aux besoins mouvants du capital, sur l’éclatement du salariat en une multitude de catégories isolées, voire antagonistes, sur la régression et la désintégration des conceptions encrées dans la mémoire collective" (notion de travail, de garanties collectives, de solidarité et d’action collective...) (176) Dans ce contexte, la résistance des classes dominées à ce projet de déstabilisation de leurs intérêts est marquée par une double caractéristique : les organisations syndicales et politiques oscillent entre un refus pur et simple d’une politique de "démantèlement des entreprises" (177), et des actions de soutient à des négociations, débouchant sur des "contrats sociaux" avec les classes dirigeantes pour des clauses de licenciement plus favorables aux salariés (178). La régression sociale a des incidences sur le travail non menacé dans son existence. La menace des acquis sociaux, des statuts, la dérègle-mentation, laissent apparaître des problèmes d’identité des classes dominées par rapport à une société ébranlée dans ses rapports sociaux. Les groupes professionnels se tournent vers des rapports au travail de type corporatifs, plus qu’à une approche interprofessionnelle stimulant une conscience collective et une identité de classe. "La crise économique dans laquelle est plongée la France du début des années quatre-vingt ne serait-elle pas elle-même l’une de ces données politiques nouvelles qui permettent aux partenaires de se retrouver et de recréer les conditions d’une véritable pratique de la négociation intégrative ?" (179). Denis Segrestin pense la crise comme l’occasion de relations interclasses dans le cadre de branches professionnelles ou de secteurs d’activité. La négociation intégrative donne "droit aux intérêts patronaux si de son côté, "la communauté professionnelle se voit confirmée dans son statuts, son identité, sa fonction de partenaire" (180). Cette relation interclasses ne débouche pas sur un compromis fondant un état providence post-moderne. Elle prescrit des accords sectoriels entre des fractions dominantes et les groupes qu’elles dirigent, afin d’établir des rapports corporatifs et intégrant les intérêts patronaux et les professionnels, cadres et salariés. Segrestin précise en disant : "... la communauté professionnelle dispose d’assez de ressources pour continuer à la fois à affirmer son identité à participer à la régulation corporative et à trouver des terrains d’entente, des occasions de repositionnement d’intérêt commun" (181). La communauté professionnelle remplace la conscience de classe. Elle convient à la résorption des concentrations industrielles et à l’expansion des petites unités de travail modernes. Elle est la forme du rapport social adapté à la troisième révolution industrielle, même si la réhabilitation du taux de profit s’accommode difficilement de l’investissement impliqué dans la négociation intégrative par le patronat. Ce type de rapports favorise la participation de la classe ouvrière à "des comportements purs et simples de défense de privilèges professionnels" (182) au détriment de la solidarité transprofessionnelle. Segrestin poursuit cette démonstration en évoquant "... les difficultés rencontrées par la CFDT. pour promouvoir le thème des "nouvelles solidarité" au sein du monde du travail : non compensation intégrale de la réduction du temps de travail, création de fonds salariaux..." (I83). Il voit dans cette anecdote le symptôme de la crise identitaire de la classe ouvrière où le corporatisme professionnel semble l’emporter sur la solidarité de classe. La classe ouvrière subit une transformation structurelle du fait de la modernisation de la société civile et de la crise de l’État providence. Ses références idéologiques évoluent avec ses transformations internes. La solution proposée par la CFDT. est une réforme interne aux classes dominées. Elle répartit les effets de la crise dans la classe ouvrière mais respecte l’ordre économique du capital et les objectifs de la classe hégémonique. Les solidarités de crise sont le fruit d’un chantage dans les rapports de classes: Les salariés s’organisent entre eux ou la restructuration s’applique dans toute sa rigueur. En aucun cas il n’est question d’un rapport de classes alternatif: à la lutte pour la reproduction de la société néo-bourgeoise contre les classes dominées. La stratification de la société capitaliste en groupes d’intérêts et en classes sociales prédispose à une régression vers la protection des acquis en temps de crise. La destruction des rapports de classes en faveur de la fraction hégémonique laisse les couches parties prenantes aux anciennes alliances face à face dans une recherche des meilleurs issues possibles pour traverser la période. Le corporatisme n’est pas une "donnée", comme le pense Segrestin. Il est la mise en oeuvre idéologique de la politique ultra libérale autour des valeurs de l’entreprise, de la compétitivité, de la concurrence. L’égalité n’y entre pas comme lai fondatrice. Au contraire, l’inégalité devient principe fonctionnel dans l’État, reconnue comme un fait objectif, selon la rentabilité des hommes et des fractions de classes par rapports aux critères capitalistes.

Pour autant, les années 1980 sont marquées par une suite de luttes, d’opposition à la politique hégémonique, défensives et sectoriels (santé, éducation...). Certes, la classe ouvrière est profondément modifiée dans ses statuts, son identité. Certes, elle est exclue de la reconnaissance dans l’État en tant que classe . Certes, ses combats font figure de réaction corporatives. Mais au delà des apparences, il y a lieu de se demander si l’entrée conflictuelle dans la troisième révolution industrielle ne préfigure pas un type de société caractérisé par une redéfinition des antagonismes sociaux comme moteur de la "société post-moderne". L’obsolescence des modes de production et des techniques, de plus en plus rapide, annonce déjà les restructurations dans les secteurs en pointe (informatique par exemple). La crise de l’État providence est une exclusion des classes dominées des négociations qui, en confrontant les intérêts, déterminent la politique de l’État. En extériorisant ces couches sociales, elle ne remet pas en cause l’existence de leurs intérêts. Elle déplace les rapports entre les classes au pouvoir et les classes dominées. Elle modifie la composition économique et l’organisation politique de la classe ouvrière, lui préparant par sa nature conflictuelle les voies d’une nouvelle identité. **

C. ÉBAUCHE D’UNE DISCUSSION.

a. Sur l’État providence comme rapport social.

L’État providence présenté comme compromis entre l’hégémonie et les classes dominées, laisse imaginer une égalité théorique entre les termes du contrat. Les positions respectives dans l’État reproduisent la structure de la société civile, tant au niveau du recrutement du personnel qu’à celui de la détermination de sa politique (184). Les classes dominées sont intégrées dans le marché politique en position de demandeuses. D’autre part, elles pèsent sur la politique de l’État en exprimant leurs intérêts sur le terrain des luttes sociales. Demandeuses signifie infériorité dans les négociations de compromis légitimant le pouvoir. La classe hégémonique a besoin d’une base populaire pour la reconnaissance de son pouvoir. "La légitimité, c’est la capacité d’un régime politique à être reconnu" (185). L’État providence est avant tout la réalisation matérielle d’intérêts universellement reconnus. Cette reconnaissance assure un statut politique et des acquis sociaux pour les classes dominées. Elle permet à la fraction hégémonique de conserver la direction de la bourgeoisie dans son ensemble. Il n’y a pas partage du pouvoir dans l’État avec les classes dominées, mais prise en compte par le pouvoir de leurs intérêts dans la politique de l’État providence. Le rapport "luttes sociales et état" n’est que la manière pour les classes dominées d’exprimer leur existence politique. Il pose les revendications et oriente la politique de l’État en directions de règlements consensuels des conflits. L’équilibre s’établit en faveur de la fraction hégémonique dans la bourgeoisie, et représente l’intérêt général. Il débouche alors sur l’incapacité des classes à fixer des compromis dans le cadre de l’État. Pour que les antagonismes inconciliables issus des intérêts économiques contradictoires ne se dévorent pas entre eux et ne détruisent ainsi la société de classes (186), la fraction hégémonique de la bourgeoisie recherche des alliances avec d’autres couches sociales, de nouveaux compromis dépassant les contradictions du temps. Elle place ainsi les institutions au dessus des classes, dépassant les anciens compromis en imposant à toute la société civile la reconnaissance des valeurs libérales et concurrentielles comme intérêt général. La coercition prend le pas sur le consentement, en cela que la transition d’un type de rapports de classes à un autre, n’est que la recherche d’une nouvelle légitimité.

b. Sur la crise de l’État providence.

La crise de l’État providence présentée comme rupture d’un rapport social, laisse imaginer une immédiateté dans ses effets. D’une part, la crise oblige le système à trouver des formes de légitimations vis à vis des classes dominées. D’autre part, l’appareil d’État et sa bureaucratie jouent le rôle d’amortisseur à la destruction des anciens rapports de classes, à tel point qu’il est juste de parler de dévaluation plutôt que de rupture des compromis. . Un état ne peut imposer sa politique aux classes dominées sans leur consentement (187). Pour cela, il dispose de formes consensuelles débouchant sur des procès de légitimation (politiques sociales). L’exclusion des intérêts des classes dominées dans les négociations au sein de l’État, modifie les liens de la classe dominante avec les classes subalternes. Ils se caractérisent par leur parcellisation dans un corporatisme s’adressant à des catégories différenciées. La précarisation statutaire et l’insécurité sociale accroissent l’éclatement catégoriels des bénéficiaires des politiques publiques. Les négociations aboutissant à des mesures concrètes, s’adressent à des groupes sociaux particuliers, et avec toute l’ambiguïté du terme font figures "d’acquis corporatifs". "Ces limites d’action dé l’État, dues à sa structure de condensation des rapports de classe, concernent enfin sa matérialité institutionnelle d’appareil. C’est là la fameuse "lourdeur bureaucratique" ou "force d’inertie administrative", façon dont les classes dominantes ou le personnel politique dirigeant saisissent, sur le mode de la disfonction, certains aspects de l’État inhérents à sa matérialité" (I88). L’importance de l’appareil d’état, ses problèmes de communications, de hiérarchie, la division du travail en son sein, sont autant de freins à la répercussion des politiques décidées au sommet de l’État. Les politiques de sécurité sociales et de santé, par exemple, engagent un personnel et des moyens, concernent des secteurs d’activité tels, que les restrictions dues à la crise de l’État providence rencontrent les limites des luttes du personnel des admi-nistrations concernées, leurs rapports avec les professions de santé et les populations. Mais les contradictions entre fractions de la bourgeoisie obligent l’État capitaliste à continuer de soutenir des marchés à aménager des couches subalternes de la classe dominante pour assurer un équilibre politique de secteurs en difficulté(médecine privée par exemple). La crise des rapports de classes générateurs de l’État providence dévalue les politiques de celui-ci: elle constitue un dépérissement de l’État providence.

Pascal Doriguzzi, le 6 Octobre 1986.

* "L’État n’intègre plus les intérêts des classes dominées dans la définition sociale de l’universalité" Ma participation au 1O° colloque national du Mouvement pour l’Accompagnement et l’Insertion Sociale en Juin 1996 à Chambéry, avait pour titre Exclusion et fait de société. Dix années plus tard et sur un sujet de travail très éloigné, je constatais l'inégalité reconnue comme norme sociale ayant pris le pas sur l'idéal républicain de l'égalité. La restructuration et la précarité des statuts du travail centre les politiques économiques sur les intérêts d'une vaste classe moyenne... Devant ce recul de l'idée républicaine en France, des "minorités" revendiquent "le droit à la différence" qui, substitut d'une égalité des droits introuvable, met en avant les distinctions des groupes sociaux à la place de la citoyenneté. Il est une position de replis, un renoncement à l'universelle citoyenneté. Ceci dans un contexte où les techniques de communication diluent la territorialité et la représentation de la nation... La "mondialisation", incapable d'égalité et reproduisant les vieux schémas de domination, ne sera jamais universelle. [Note le 08.09.2000]

** La "classe ouvrière", "le prolétariat" est très différant de celui des années 1950 ; "la nouvelle pauvreté" des années 1980, et la précarité de l'an 2000 leur donne un aspect ressemblant souvent à "l'Underclass", au peuple de l'abîme décrit par Jack London au dix-neuvième siècle à Londres. "En dernière analyse, qui garantit encore la survie du nouveau Tiers-État sinon l'idée Républicaine ?" [Note le 08.09.2000]

 

BIBLIOGRAPHIE

 

(132) Hegel "Principe de la philosophie du droit" (Berlin, 1821), éd. Idée - S/Gallimard, 6 Novembre 1979n P. 270, 3° section, & p. 257.

(133) Friedrich Engels "L’origine de la famille, de la propriété privée, de l’État" (1874), éd. Sociales, chapitre 9, "Barbarie et civilisation", P. 281.

(134) K. Marx "Le 18 Brumaire de Louis Napoléon Bonaparte" (1848), éd. Sociales, P. 125.

(135) Nicos Poulantzas "L’État, le Pouvoir, le Socialisme" ed. PUF. 1981, P. 141.

(136) Antonio Gramsci "Notes sur Macchiavel" éd. Sociales (Gramsci, textes) Janvier 1983, P. 273-274.

(137) Nicos Poulantzas "Pouvoir politique et classes sociales" éd. Maspéro, collection Fondation, 1982. P. I5I.

(138) Nicos Poulantzas "L'Etat, le Pouvoir, le Socialisme" Déjà cité, P. 144 et 145.

(139) Gramsci, cité par André Gorz dans "Réforme et révolution" ed. Le Seuil, 1969, P. 238-248.

(140) Ralph Miliband "L’État dans la société capitaliste" éd. Maspéro, 1982. P. 298 à 301. (Ralph Miliband est maître de confé rence à la London School of Économies).

(141) Antonio Gramsci "Les cahiers de prison" éd. Gallimard, tome 3.

(142) Nicos Poulantzas "Pouvoir politique et classes sociales" déjà cité, P. 234-235.

(143) Perry Anderson "Sur Gramsci" petite collection Maspéro, 1978, P. 50.

(144) Idem .

(143) Idem P. 61.

(145) Perry Anderson "Sur Gramsci" déjà cité, P. 5I.

(146) Perry Anderson "Sur Gramsci", déjà cité, P. 50.

(147) Voir à ce sujet l’ouvrage de Bernard Edelman "La légalisation de la classe ouvrière" éd. Christian Bourgois, tome 1, p. 197.

(148) Nicos Poulanzas "L’État, le Pouvoir, le Socialisme" déjà cité, P. I54.

(149)Nicos Poulantzas "L’État, le Pouvoir, le Socialisme" déjà cité p. I58.

(150) Lénine "Thèse sur l’assemblée constituante" 19I7. Lénine définit le double pouvoir comme démarche des classes dominées pour construire une autre forme de pouvoir. ed. Moscou, 1962.

(I5I) Perry Anderson, déjà cité.

(I52) Jürgen Habermas "Raison et légitimité" éd. Payot. 1978, P. 55. Traduit de l’allemand par Jean Lacoste.

(153) Ralph Miliband "L’État dans la société capitaliste" déjà cité, P. 30l.

(I54) Lélio Basso "Que devient la social-démocratie dans la société néocapitaliste ?". Revue Internationale du socialisme. janvier-Février 1965. Pages 42 a 52. Cité par Chatelet/ Pisier-Kouchner/ Vincent "Les marxistes ct la polique" Pages 445 à 449.

(155) Idem (154).

(156) Alain Touraine, Michel wieviorka, François Dubet, "Le mouvement ouvrier" éd. Fayard, P. 288. (1° trimestre 1984).

(157) J.P. de Gaudemar "Usines et ouvriers. Figures du nouvel ordre productif" éd. Maspéro, 1980.

(158) Au sujet de la précarisation des statuts, notemment par l’utilisation d’entreprises intérimaires, consulter la revue "CFDT. Aujourd’hui" N° 40, P. 25.

(159) Revue "Critique de l’économie politique" N° 15-I6 (Avril Juin 198I), Article de Alain Azouvi "Théorie et pseudo-théorie: le dualisme du marché du travail".

(160) Perry Anderson "Sur Gramsci" déjà cité.

(161) Jügen Habermas "La technique et la science comme idéologie" éd. Denoêl, I984. P. 7.

(162) Idem, P. 8.

(163) Lélio Basso "Que devient la social-démocratie dans la société néocapitaliste ?" déjà cité.

(164) Jürgen Habermas "La technique et la science comme idéologie" déjà cité, P. 6.

(165) André Gorz "Adieux au prolétariat" déjà cité, P. 121.

(166) Voir la revue de la CGT. "Analyse et documents économiques" N° 21 Juillet I986, l'article de Alain Guichard "Utilisér la crise pour démanteler" P. 44.

(167) Antoine Lion et Pierre Maclouf "L’insécurité sociale. paupérisation et solidarité" éd. Lés éditions ouvriéres, Oct. I982. P. 37 à 39.

(168) Idem P. 7 et 8.

(169) Idem, P. 57.

(170) Idem, P. 25 à 33.

(171) Lion et Maclouf "L’insécurité sociale" déjà cité, P. 60, et graphique P. 61.

(172) Idem, P. 59.

(173) Idem, P. 167 à 173.

(174) Revue "L'économie en question" Numéro hors série, I983-I984 ; "Planification, socialisme et IX° plan". Article de JM. Fenet : "L’emploi, solde ou priorité" P. 25.

(175) IX° plan, tome 2 "Stratégies et grandes actions" P. 109.

(176) "Analyses et documents économiques" N°2I, déjà cité, P. 25. Article de Jean Moulin "Projet libéral et gestion de la crise".

(177) Idem, P. 42. Article de Alain Guichard.

(178) Voir à ce sujet l’ouvrage de René Mouriaux "Syndicalisme et politique" collections Portes Ouvertes, éd. Ouvriéres, Octobre I985. , notemment page 150 et suivantes où l’auteur fait état des difficultés face aux tensions "corporatives".

(179) Denis Segrestin "Le phénomène corporatiste" Fondation Saint-Simon Fayard, Mars 1986. P. I85.

(I80) Idem, P. 102-1O3.

(181) Denis Segrestin "Le phénomène corporatiste" déjà cité, P. 186.

(182) Idem, P. 187. Segrestin prend l’exemple des débrayages de cheminots et d’agents d’EDF. , perçus - dit-il - par le public comme des abus de position.

(183) Idem, P. I88. Voir "Syndicalisme-Hebdo" n° 1890. - 3 Décembre 1981, l’articlé de Edmond Maire "La solidarité au coeur des débats et, de notre action".

(184) Nicos Poulantzas, déjà cité Page 70.

(185) Jürgen Habermas "Après Marx" éd. Fayard, Aout 1985. P. 250. Traduit de l’allemand par J.R. Ladmoral et M. B De Launay.

(186) Friedrich Engels "L’origine de la famille, de la propriété. privée, de l’État" déjà cité, Paqe 69.

(187) Antonio Gramsci, déjà cité, Paqe 75.

(188) Nicos Poulanzas "L’État, le Pouvoir, le Socialisme", déjà cité, P. 216.

Pascal Doriguzzi, le 6 Octobre 1986.

 

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