Article de Pascal DORIGUZZI Décembre 1990 - Janvier 1991, et paru dans la revue EMPAN N°7 - Février 1992 -

 

LA SOCIALISATION DU HANDICAP INTRODUCTION

 

INTRODUCTION

L’avènement du handicap n’est pas un élément mineur de l’Histoire : histoire sans histoire dirait-on, par rapport aux couronnements et aux guerres ; en soulevant le voile des apprarences, on traverse la genèse révolutionnaire du monde contemporain, ses luttes politiques et affrontements militaires, on suit l’évolution de la pensée politique de la na-tion, depuis 1789 jusqu’aux fonda-tions institutionnelles contemporaines. Il participe à la construction des principes républicains.

Mais celui qu’on appelle "infirme" (du latin "infirmus" = faible) entre dans une catégorie de pauvres, marginaux, vagabonds, indigents, que jusque sous la troisième République, la société traite par la bienfaisance privée. Si celle-ci est remplacée par "l’assistance publique" depuis le 14/7/1905, le terme "solidarité" recouvre depuis longtemps le discours politique sur le social.

La "solidarité" entre dans le débat public en 1848. Elle prend un sens précis en ce moment crucial pour l’avenir d’une révolution : instituer une République "qui fait du social" pour éviter la revendication populaire d’une "République sociale". Le vocable reste présent dans le débat politique jus-qu’à nos jours. La société libérale se caractérise par une structure sociale in-égalitaire où la "solidarité" prétend jouer le rôle de contrepoids aux difficultés, à la pauvreté, à la marginalité de groupes sociaux (nouveaux pauvres, handicapés...) (1)

Certes, les événements n’ont plus la charge dramatique de 1848. Mais tous les partis, groupements d’intérêt, syndicats..., utilisent ce vocable. Il importe d’avoir une "vision sociale" de la société à modifier, ou une "vision du social" dans la société telle qu’elle est. Le concept de solidarité sert d’unificateur national, à condition de ne pas approfondir le sens que lui donne tel ou tel parti. Tous ont la solidarité dans leur programme. Chacun en a une définition différente, suivant qu’il se positionne sur le champ économique, dirigiste ou libéral, de la responsabilité ou de l’assistance, du secteur public ou privé.

Le théme de l’infirmité puis du handicap évolue avec les événements politico-historiques du monde contemporain. Des discussions animent périodiquement le parlement. La "solidarité" y trouve un espace privilégié : dans les positionnements et affrontements des partis sur le champ du social, elle joue le rôle de principe statuaire de la socialisation. "L’infirme", puis le "handicapé" deviennent à la fois des sujets de droit et des objets de solidarité. Ils bénéficient de dispositions juridiques propres qui les distinguent des autres citoyens, mais politiquement organisées dans le cadre d’une solidarité où se mêlent les notions contradictoires de bienfaisance, d’assistance, d’intégration... Le caractère "humanitaire" de l’objet traité (l’infirmité, le handicap) explicitement souligné dans tous les travaux préparatoires des législations, appelle à l’unanimité, culpabilisant les oppositions à telle ou telle mesure.

Mais l’assistance aux vieillards, infirmes et incurables de la loi du 14/7/1905, les pensions pour les mutilés de la Grande Guerre de la loi du 31/3/1919, et l’Allocation aux Adultes Handicapés de celle du 30/6/1975 représentent des périodes politique fort différentes. Producteur de droits, le faux consensus de la solidarité abrite les besoins d’unité d’une nation en guerre, le développement de l’Etat Providence désormais présent dans des domaines jusqu’alors privés (santé, famille, économie...), les transformations de la société libérale et néo-libérale. Ainsi le handicap continue d’être un objet à propos duquel s’expriment des besoins idéologiques investis dans la solidarité nationale ; tout comme "l’infirme" de 1905 s’inserre entre la lutte des républicains et monarchistes sur la séparation de l’Église et de l’État, des radicaux, socialistes, et les conservateurs sur la retraite ouvrière... Sujet de droit comme notion juridique, tout en préservant l’objet en le dis-tinguant sous le label générique de la solidarité !

Comment le discours politique se transforme-t-il malgré (et avec) le chapeau toujours présent de la solidarité ? Qu’est-ce qui fait l’infirme de 1905, le mutilé de 1914-18, l’invalide des années 30, le hadicapé de 1957 ? Celui-ci reste-t-il le même en 1975 ou en 1987 qu’en 1957, en terme de statut social et de rôle politique ?

Comprendre la socialisation du handicap nécessite une lecture politico-historique des quatre moments déterminants pour la constitution statu-taire du handicap.

 

A - DE L’ANCIEN REGIME A 1905 :

INFIRMES ET SOCIETE INDUSTRIELLE.

Le Moyen-âge classe l’infirme dans la catégorie générique des "pauvres". Il bénéficie de l’hospitalité écclésiale dans les paroisses urbaines, et de "l’hospital infirmus" dans les monastères ruraux, réservé aux blessés, malades et infirmes. L’Église s’investit dans l’hospitalisation et la charité envers les pauvres. Avec François d’Assise le devoir de charité devient "fraternité dans le Christ". La charité est un partage fraternel. Certes, le donateur assure le salut de son âme, et le geste demeure intéressé. Toutefois, la conception de l’aumìne préserve la dignité du pauvre en excluant tout jugement moral.

L’essor des cités marchandes (XIV°-XVII° siécles) développe la pensée "humaniste", une définition individualiste de l’humain : les qualités et vertus de l’homme lui permettent de s’élever tant sur le plan moral que matériel. L’idéal social devient la réussite, le pouvoir, l’argent, les relations, l’influence. L’infirme demeure objet de charité mais sans le rapport fraternel franciscain. Il représente une figure négative de l’idéal humaniste, avec le pauvre, "l’impotente" (débiteur insolvable)... l’aumône devient fraternité "philanthropique".(1)

La nuance idéologique doit être soulignée, car ces concepts se retrouvent implicitement, voire explicitement exprimés dans les débats politiques contemporains sur la solidarité.

Michel FOUCAULT suit les mutations conceptuelles de la folie, de la fin du monde médiéval aux temps modernes. (2)

Des périodes où les fous incarnent certaines représentations et reçoivent différents statuts précèdent la mise en ordre des déviants et la délimitation géographique de leur espace social (enfermement). Certes, la référence peut porter à discussion si on limite le champ de travail à l’infirmité phy-sique. Mais la distinction d’avec les malades mentaux est récente. (3)

De l’âge classique à 1905, la plupart des infirmes aboutissent dans les mêmes enceintes que les fous. La loi du 30/6/1938 ne fait pas la distinction, laissant ce soin aux médecins, sinon aux policiers... Plus tard, la loi du 14/7/1905 mêle vieillards, infirmes et incurables. Jusque dans les années 30, des invalides sont placés en hôpitaux psychiatriques car ni la médecine, ni la rééducation ne savent les soigner (Invalide Moteur Cérébral, par exemple).

L’histoire de la folie révèle le remplacement de la définition reli-gieuse des déviants par la morale. La société enferme ses anormaux dans une logique de l’ordre, de la police, de la morale. Ces thèmes structurent les travaux parlementaires de la loi du 14/7/1905 (4). Henri-Jacques STICKER constate la confusion de vieillesse, pauvreté, folie, infirmité, depuis l’âge classique, dans un souci de conformité avec la morale ambiante à un moment donné (5). Objet de bien-faisance, l’infirme trouve tout naturellement sa place à l’écart du monde social, de l’hôpital général aux Invalides en pas-sant par les structures caritatives et les prisons... L’absolutisme royal représente un Etat structuré, un ordre moral qui distigue et régit les marginaux, les contrôle quend ils sont nombreux, ou les enferme (6), (mandiants, vagabonds, prostituées, infirmes...).

La Grande Peur issue des troubles révolutionnaires de 1789 suscite la création du Comité de Mendicité présidé par le Duc de LAROCHE FOUCAULT LIANCOURT. Le Comité inscrit "l’assistance" comme "devoir social" dans son premier rapport le 12 juin 1790. Première apparition de l’assistance dans un débat public, l’affirmation introduit le conflit entre les initiatives publiques et la bienfaisance privée comme réponses à des questions relevant habituellement de rapports privés (famille, pauvreté, infirmité, ...). La question se pose toujours en ces termes au bicentenaire du Comité de Mendicité : tout thème social débattu au parlement soutend le même affrontement, certes affiné avec le temps, modifié par l’état économique et social à une période donnée, mais présentant les mêmes antagonismes. Le "droit au travail" (1848), l’Assistance médicale gratuite (14/7/1893), le Revenu Minimum d’Insertion (1/12/1988) générant des similitudes de positionnements politiques : domaine privé/domaine public, initiative privée (mutuelle, association)/ politique publique (État), bienfaisance privée/assistance publique. La bienfaisance privée a sa place dans les travaux du Comité, car la querelle germe déjà. L’inves-tissement séculaire de l’Église dans l’action sociale pose à celle-ci des difficultés pour concrétiser la "fraternité révolutionnaire". Marcel DAVID y voit un repoussoir (7). Malgré cela, le Comité propose un domicile de secours pour fixer les vaga-bonds et sauvegarder les relations familiales ; un asile par circonscription pour vieillards et infirmes isolés. Le montant des aides est inférieur à celui du travail. Principes résolument "modernes" car structurant la loi du 14/7/1905 (8).

La chute des orléanistes en Février 1848 introduit un nouveau concept dans le champ politique : "le social". Jusqu’alors les "accidents de la vie" (chômage, misère, maladie...) étaient des objets d’ordre privé. Les associations de secours mutuelles se développent dans les villes industrielles. La pratique des soirées de charité, bals ou quêtes, vente au profit de l’hôpital, des vieillards, des enfants malades, de tel ou tel hospice.... constitue le rapport social du mode de production industriel avec le paupérisme qui en dé-coule. La préoccupation de l’ouvrier(e) des fabrique se limite au pain quotidien et à payer le loyer du lieu souvent misérable où il vit. Les salaires faibles ne permettent pas l’épargne en vue de jours mauvais, et le chomage signifie la misère. En Février 1848, le prolétariat entre sur la scène politique sous la bannière du "droit au travail".

Le principal acquis social des journées de Février réside dans les "ateliers nationaux", qui emploient les chômeurs et surtout les populations in-surgées qui constituent les "troupes" de la nouvelle assemblée. Il n’y a pas de ministère du travail, mais une "Commission du gouvernement des tra-vailleurs", présidée par Louis BLANC et siégeant au Luxembourg. Au mois de Mai, le peuple de Paris demande à ses élus de soutenir militairement les insurgés de Pologne, et devant son refus, proclame un Gouvernement provisoire à l’hìtel de ville. Inquiéte, l’Assemblée dissout les ateliers nationaux, devenus une menace pour elle. L’insurrection ouvrière de 23 au 26 juin su-bit une terrible repression par Cavaignac et la Garde Nationale. La République élimine le peuple qui l’a instaurée. Fracture entre l’ordre politique et la réalité sociale, la déchirure visible entre la liberté, la propriété et la concurrence, et les droits sociaux revendiqués, occasionne l’introduction d’un terme neuf dans le discours politique : "la solidarité". Celle-ci est sensée reconstituer le lien entre l’ordre politique affirmé par la république (liberté, égalité, fraternité), et la réalité sociale (inégalités, propriété comme cadre juridique des libertés). La solidarité ne remet pas en cause l’ordre social, mais crée des liens entre les classes par un nouveau "contrat social" : il s’agit de "faire du social" (9). L’Assemblée Nationale débat sur le droit au travail défendu par les Députés de gauche et d’extrême-gauche, à l’automne 1848. Largement majoritaire, le courant réactionnaire préfére la "solidarité de la nation", avec "l’assistance que la société a le devoir d’accorder" (aux vieillards et infirmes). Le débat intègre dans la solidarité l’assistance, la bienfaisance, la charité chrétienne, aussi bien que toute initiative publique ou privée pour "faire du social" (10). La "solidarité" joue le rôle social de la République et du libéralisme, avant de devenir facteur d’unité nationale sous la IIIème République, puis après la seconde guerre mondiale, le cadre conceptuel de toute loi sociale. Celles-ci contiennent tous les concepts de la charité, de l’assistance, de l’humanisme, ... dès qu’elles concernent l’infirmité, le mutilé de la Guerre, le handicapé.

La loi du 14/7/1905 sur l’assistance obligatoire aux vieillards, infirmes et incurables concrétise un compromis entre les partisans de la retraite ou-vriäre et paysanne (radicaux, radicaux-socialistes, socio-démocrates), et les libéraux, monarchistes, etc... (11). Les organisations patronales s’appuient sur les parlementaires conservateurs pour retarder, voire infléchir dans leur sens (leur intérêt) tout projet social au nom de la liberté d’entreprendre, de la compétitivité,... Ils font traîner ces textes pendant des années : la responsabilité des accidents du travail aboutit ainsi au bout de dix-huit ans. Si le texte sur les vieillards, infirmes et incurables arrive à terme en 1905, c’est par rapport au projet de retraite ouvrière : plutôt que de reconnaître la vieillesse du travailleur comme un droit issu d’une vie de travail, les défenseurs du libéralisme préfèrent assister des vieillards. Un droit à la retraite se vit comme un dû par le patronat, alors que l’assistance représente une faveur appelant reconnaissance. Le débat reproduit la trame de celui sur le droit au travail cinquante sept ans plus tôt. Il demeure celui de tous les débats par-lementaires sur l’emploi des mutilés de la Grande Guerre, puis sur les travailleurs handicapés... Un droit obligeant le patronat semble inadmissible à celui-ci.

Le projet porte la marque d’un affrontement politique long et violent : la Séparation de l’Église et de l’État. Anne-Marie GUILLEMARD traite de la gestation de la retraite et de la protection sociale de la vieillesse sur le même axe qu’ATZFELD, la question de l’obligation patronale, élargissant son étude à la lutte syndicale (12).

Tous deux effleurent le contexte politique où baigne l’élaboration de la loi de 1905 : la Séparation de l’Église et de l’État. Celle-ci revêt une importance capitale à une époque où la France passe d’une ère économique et politique "rurale", à une industrialisation dominante. La propriété terrienne et son corrolaire idéologique l’Église perdent de leur influence. L’opposition au "combisme" (Emile Combe est radical, Président du Conseil de 1902 - 1905, réalisateur anti-clérical de la Séparation de l’Église et de l’État) - l’oppo-sition conservatrice, donc - déclenche un combat d’une violence politique auprès de laquelle la réaction contre la loi Savary de 1984 fait figure d’es-carmouche (voir des personnatlités comme le Comte Albert DE MUN ou le Chanoine BOULARD) (13).

Certes, la guerre du patronat contre le principe d’obligation structure le débat "social" depuis 1875. Toutefois l’enjeu soutendu par la loi du 14/7/1905 réside dans l’attaque de la notabilité locale sur le plan des solidarités traditionnelles, vernaculaires dépendantes de la noblesse en milieu rural, écclésiastiques en milieu urbain. La première loi d’assistance publique représente un compromis entre la Séparation de l’Église et de l’État d’une part, et la préservation des doctrines confessionnelles dans les "questions sociales".

La situation du prolétariat s’améliore depuis la Commune de Paris (1871). Les partis ouvriers s’organisent et obtiennent des représentants au parlement, des avancées sociales (avril 1898 et les accidents du travail...).

Paul LAFARGE (Parti Ouvrier Français) revendique en ces temps non le droit au travail, mais "le droit à la paresse" (14). L’anecdote représente une transformation de la conscience sociale ; le développement économique et les progrès politiques de l’État laïque et républicain, permettent d’envisager une forme institutionnelle conforme à la République du XX° siècle. Il convient de faire "autre chose" que les dépôts de mendicité où finissaient vieillards et infirmes (avant l’asile psychiatrique) sous le Second Empire. La réponse institutionnelle promeut l’assistance en généralisant les hospices civils dans chaque département ou canton. L’aide à domicile reçoit la préférence du bureau de l’hygiène publique au ministäre de l’Intérieur. Le domicile de secours fixe le vagabondage et préserve la famille comme valeur sociale. Le montant de l’aide est inférieur au prix de journée du travail afin de ne pas encourager "l’oisiveté" et "l’imprévoyance". La période met en oeuvre les travaux de l’Assemblée de 1790 et reprend les réserves de l’hu-manisme sur la pauvreté.La loi du 14/7/1905 s’applique en l’état jusqu’à celle du 2/9/1949.

Au début du siècle, la notion d’assistance semble la solution la plus adaptée pour réprimer la misère et la mendicité notemment chez les infirmes. Une société n’a que le niveau de conscience de son développement. L’assistance des infirmes dans des hospices dessine le rapport social de cette population. Elle n’a pour alternative que la misère des bidonvilles ou l’errement dans les campagnes ; l’espace social des infirmes n’est pas une question à l’ordre du jour (15).

 

B - LA PREMIERE GUERRE MONDIALE :

LES MUTILES ET LA SOLIDARITE NATIONALE.

La Grande Guerre tue environ 1.382.000 hommes dans les rangs français. Phénomène moins présent dans les esprits, il survit des combats 388.800 mutilés, 1.000.000 d’invalides (gazés, mutilations laissant apte au travail, et aussi des centaines de milliers d’aliennés (1). Il faut ajouter les tuberculeux victimes d’années de misère, de boue.

C’est un véritable choc à l’époque : la société n’est pas prête à accueillir ceux que l’on appelle "mutilés" par déférence pour leur honneur de défenseur de la nation, mais aussi pour les distinguer des "infirmes civils".

En effet, on ne peut traiter les héros des tranchées en les assujetissant à la loi de 1905 comme des diminués physiques et indigents. La nation toute entière se porte volontaire pour la Guerre, après l’échec de la II° Internationale contre la montée du péril et le meurtre de JAURES. La France entre en guerre exaltée contre les allemands, optimiste quant à la durée du conflit. Campagnes patriotiques et manifestations enthousiastes se multiplient (2). Pendant les hostilités, l’ensemble des forces politiques font passer la "défense nationale" avant les intérêts partisans (SFIO : Section Française de l’Internationale Ouvrière, par exemple). "L’Union Sacrée" responsabilise le pays autour des mutilés. Ceux-ci reviennent du front en héros servant d’exemple de courage dans les campagnes de mobilisation (3).

Toutefois, les difficultés de soin, d’argent, de réintégration dans la vie quotidienne inscitent les mutilés à fonder des associations de défense.

Ils fondent ainsi les premières associations d’Anciens Combattants (4). Durant et après le conflit, ils modifient le rapport social de la société et de l’invalidité. En se réintégrant autant que faire se peut dans le travail, la famille, la cité, les victimes du front expérimentent la premiäre génération d’invalides dans la cité. Beaucoup de leurs réalisations subsistent dans la vie des handicapés aujourd’hui (rôle du ministère des anciens combattants par exemple). Mais le sens de la "solidarité nationale" vis-à-vis des mutilés devient un véritable principe du rapport social des mutilés, invalides, puis handicapés.

La loi du 31/3/1919 sur les pensions des mutilés de la Guerre est l’objet de débats courts pour une question sociale sous la III° République. À l’armistice, on pense à la Révolution russe, à la guerre civile en Allemagne, et cette véléité résulte de l’inquiétude de millions de démobilisés aguerris, coupés de leurs liens de sociabilité d’avant-guerre (emploi, famille, surtout...) d’où l’urgence d’une "reconnaissance nationale".

Le débat s’emplit d’appels à la "solidarité" à la "solidarité nationale", comme à la "dette de la nation", à la "responsabilité du pays" (5). Ces "héros" ensensés par les parlementaires de tous bords baignant dans l’allégresse de l’Union Sacrée (discutable à propos de tout autre objet à l’époque), voient leur situation sociale se dégrader, du fait des objections des employeurs à embaucher des mutilés (6).

Les travaux préparatoires de la loi du 26/4/1924 sur l’emploi obligatoire des mutilés ne parlent pas de héros, mais de "charges pour les entre-prises", de "question humanitaire", de "mutilés à occuper" (7). Les organisations patronales font tout pour éviter la présence de mutilés sur les lieux de travail.

Le sort des mutilés se rapproche de plus en plus de celui des infirmes civils avec le temps, et le versement des pensions à ces exclus du travail ressemble à des mesures d’assistance. (En 1935, le statut de Grands Mutilés protège leurs pensions contre l’inflation, et fixe les conditions de secours particuliers - à domicile ou en hospice -). Ainsi entre une constante dans l’action administrative sur l’invalidité puis le handicap : la séparation du revenu et du travail. La solidarité évoquée dans les deux Débats se reproduit dans les textes sur le statut et sur l’emploi des travailleurs handicapés. Son sens devient alors une reconduction de cette pratique administrative où s’entremèlent assistance publique et solidarité.

 

C - LES ANNEES 30 : INFIRMES et INVALIDES.

Le Docteur Max-Jules-Alfred ROUSSEAU définit le mot "estropié" dans sa thèse de médecine soutenue à Chartres en 1939 (1). Définition médicale s’appuyant sur des travaux étrangers (suédois, américains, etc...), elle parle de l’infirme, de l’invalide, du mutilé. Au cours de sa thèse, à propos de la politique médicale en Hongrie, M. ROUSSEAU parle de "handicapé physique". Le vocable n’est pas employé dans le public, ni dans le débat politique. "Infirme" s’applique à des cas civils d’anomalies congénitales ou acquises, "mutilé" à des blessés de guerre, "invalide" l’accidenté du travail ou de gurerre, l’impotent, celui qui recquiert la présence d’un autre en permanence.

L’administration utilise le terme d’infirme, le ministère des anciens combattants celui de mutilé, la terminologie employée dans la presse et la littérature préfère fréquemment "invalide"(2).

L’épidémie de polyomiélite prend de cours la société de l’après-guerre. la médecine peut enrayer la maladie, mais les soins de rééducation sont embryonnaires. Des institutions fondées pour les "poilus" de la Guerre, se consacrent à la gestion de ce fléau (BERCK par exemple). Pour ceux que la sortie laisse invalides, la société n’offre que le retour dans la famille ou l’hospice prévu par la loi du 14/7/1905.

En 1933 naît l’Association des Paralysés de France. Elle constitue un réseau d’entraide pour des soins, l’appareillage, la scolarité et la formation professionnelle... Les institutions sanitaires refusent tout concours, car la sortie de ces gens hors des hospices et asiles ne figure pas encore dans leurs objectifs (3). D’autres organisations voient le jour (4). De la crise économique et politique des années 30 (5) qui met en cause les pensions et certains acquis des anciens combattants (6) au Front Populaire (7), jusqu’aux scandales politiques (l’affaire Stavisky) (8), l’histoire de mutilés et invalides qui tentent d’y faire leur place se caractérise de la distinction sociale, par l’origine de la déficience : "infirme" à la naissance, mutilé à la guerre, "invalide" au travail ou acquis en cours d’existence (polyomiétite). La définition ne se médicalise pas encore. Le poids politique des anciens combattants empêche encore la société de remettre l’invalide à la médecine. Le terme "invalide" compare socialement le porteur d’une déficience quelconque, limitant ses capacités dans l’existence (gagner sa vie par exemple). La société considère porter une responsabilité dans cet état de fait, alors que "l’infirme", s’il n’est pas responsable, n’est qu’un jouet du "destin", de "la vie".

La solidarité ne veut pas dire la même chose pour l’infirme de 1905 et l’invalide reconnu par la loi de 1919.

 

D - L’APPARITION DU "HANDICAP".

a) L’Etat Providence et la médicalisation.

La loi du 2/8/1949 harmonise la loi du 14/7/1905 avec les dispositions parues depuis la II° Guerre Mondiale. Une nouvelle approche "du social" se fait jour. Les sociétés occidentales d’après-guerre s’orientent vers la politique keynédienne du "Walfer statt". L’État devient le moteur de la société libérale. Il introduit des politiques publiques dans des questions traitées comme privées : le travail social occupe le terrain en se professionnalisant (1), dans les domaines de la famille, de l’enfance, de la santé (ordonnance de 1945-46 sur la sécurité sociale). Il organise les rapports syndicats ouvriers-patronat, débouchant sur des droits sociaux dans le monde du travail...

L’infirmité connaît la médicalisation. Les Débats de 1949 parlent d’invalides, d’infirmes (2). Si le principe de l’enfermement subsiste, il concerne plus le milieu hospitalier et le centre de réédu-cation que l’hospice. "L’enfance infirme" comme l’adulte sont "pris en charge" par les institutions (3). La loi du 23/11/1957 ouvre l’ère du "handicap".

De l’anglais "hand in cap" (main dans le chapeau, course hyppique équilibrant les chances des concurrents), le vocable compare les capacités non entre individus, mais avec une norme statistique, un étalon moyen auquel tout individu s’évalue. De sexe masculin, jeune sans être âgé, en bonne santé, intellectuellement et physiquement sans particularité, ce phantasme désigne ceux, qui à un titre ou un autre, ne lui correspondent pas. Ces derniers ont alors un statut social propre. Le "travailleur handicapé" fait passer le travailleur avant le handicapé, mais en même temps qu’il le définit comme tel (un travailleur), le distingue.

La loi du 23/11/1957 crée et généralise les Ateliers de Travail Protégés (réservés principalement aux handicapés physiques), et les centres d’Aide par le Travail (pour handicapés mentaux). Cette démarche médicalise le travailleur handicapé et préserve l’entreprise ordinaire de sa présence (l’attitude patronale reproduit celle de 1924). Elle n’évoque à aucun moment les postes à res-ponsabilité et confine le travailleur à des tâches d’exécution. Le revenu est partagé entre le salaire et l’assistance ; il est bien sûr inférieur au salaire minimum de la profession. L’ensemble du Débat de 1957 baigne dans un paternalisme palpable sous les positions de D. ULRICH ou A. GAZIER, comme d’A. MORA ou S. GIRAULT (4).

Remarques analogues pour la loi du 31/7/1963 sur l’allocation aux mineurs infirmes. Celle-ci ne s’obtient que par le placement des enfants en écoles spécialisées. Certes, la préoccupation du moment réside dans le besoin des familles seules avec un enfant "infirme" dont elles ne savent que faire. Mais dans l’esprit du temps, on pense à l’ouverture d’écoles "spécialisées" sans alternative (5).

La dimension statistique introduite dans les politiques sociales aboutit à produire un "ordre normatif" de masses (6). Il désigne, étiquette, distingue, normalise (met en normes) les catégories sociales auxquelles s’adresse le travail social. Toute l’existence du handicapé se passe dans un règlement légal et administratif pour se dérouler dans l’apparté d’un arrière-monde charpenté par des "spécialistes de tout poil (7).

La protection de l’ordre social ne relève plus comme sous la III° République de mesures de police (enfermement en hospice ou dans cet espace privé qu’est la famille). L’ordre relève désormais d’un statut social particularisé par l’existence d’une place dans le discours politique.

Celle du handicap est la médecine sous l’Etat Providence. La situation des handicapés à la fin des années 60 stagne dans le marginalité ou au mieux, dans un statut professionnel minoré. Le pari de l’Etat Providence consiste à permettre la vie à tous (vieillards, handicapés, indigeants,...) grâce à un éventail d’assurances diverses qui socialisent les risques de l’existence (sécurité sociale, retraites, risques d’accidents, etc.). Mais cet objectif une fois atteint, la finalité de l’action demande de faire autre chose qu’une simple survie du handicapé dans un statut d’assisté social permanent.

b) La modélisation du handicap.

Le Premier Ministre Georges POMPIDOU commande un rapport sur la question à François BLOCH-LAINE. Celui-ci aboutit, alors que le parlement vote une loi sur les incapables majeurs ; cette dernière fonde une tutelle aux allocations, faisant peser une présomption d’incapacité sur le personne sujette à l’aide sociale (1). A contrario du type de réflexion que cela représente, le rapport BLOCH-LAINE plaide pour l’ouverture de la société aux handicapés, contre la mise à l’écart des handicapés par la politique pro-tectrice de l’État Providence(2).

Le mouvement politique de MAI 1968 évoque parfois les "minorités" en exigeant le droit à une vie sociale digne de ce nom. Des tendances du mileu hospitalier vont dans le même sens (anti-psychiatrie).

En 1970 et 1971, Marie-Madeleine DIENESCH utilise le rapport BLOCH-LAINE pour obtenir des lois visant à faciliter la vie sociale des handicapés. L’idée "d’intégration sociale des handi-capés" est dans "l’air du temps", comme l’a été celle de médicalisation dans les années 50.

Toutefois, les contradictions antérieures se retrouvent dans ces conceptions sociales : la loi du 30/6/1975 l’exprime à deux niveaux :

- elle définit le statut social du handicap, mais dans une définition de la solidarité qui ne départage pas paternalisme et innovation "progressiste", remplaçant l’assistance par la solidarité ;

- elle ne définit pas "le handicap" et laisse aux commissions départementales (COTOREP : COmmissions Techniques d’Orientation et de REclassement Professionnel) la responsabilité d’attribuer la qualité de handicapé, le taux de handicap, et le traitement social souhaitable (3).

La "personne handicapée" devient sujet de droit, en recevant des dispositions juridiques spécifiques, tout en n’étant pas définie. Le parlement renonce explicitement à préciser de qui il traite, de quoi il parle (4). Dès lors, "handicapé" devient le receptacle ouvert de toutes les conceptions dont ont été habillés "l’infirme", "le mutilé", "l’invalide". De même, la "solidarité" devient la définition du statut social du handicap.

La loi du 30/6/1975 veut remplacer "l’assistance" par la "solidarité" en prenant des initiatives pour "désenclaver" le handicap, l’intégrer dans le monde ordinaire. Pas plus qu’elle ne dit ce qu’est un handicapé, elle ne donne de sens précis à la solidarité. Celle-ci reçoit à son tour les pratiques de l’assistance publique, de charité privée, de médicalisation administrative (tout rapport social demande dossiers et contrôles médicaux) et ouvertures dans la société (habitats, loisirs, sports,...).

En l’absence de définition le handicapé devient un modèle social, un concept objectivé et carac-térisé par la solidarité comme rapport social.

La loi du 10/7/1987 en faveur de l’emploi des travailleurs handicapés renforce cette modélisation: elle est une "loi de solidarité nationale" ; elle perpétue les rétiscences patronales à l’embauche de travailleurs handicapés et la minoration statutaire de ceux-ci ; elle présente son emploi comme un geste humanitaire, plus qu’un rapport professionnel (5).

La crise économique des années 1970 et 1980 transforme le discours sur la solidarité. Elle devient caution de la politique néo-libérale contemporaine. La politique libérale des années 1983 produit une "nouvelle pau-vreté" et un chômage chronique. L’État répond par des systèmes de pré-re-traites, et des travaux précaires (TUC, stages divers...) qui atteignent les statuts des salariés. A la fin des années 1980, la société libérale sort de la crise en se structurant sur la précarité. Celle-ci n’est plus une procédure de crise, mais un statut social dans le nouvel ordre néo-libéral.

Le travailleur handicapé se trouve affecté par ce mouvement : qualifié par la solidarité, la précarité et la fermeture du marché de l’emploi le visent au premier chef. Puisque des adultes en pleine santé sont marginalisés, l’assistance du handicapé semble dans l’ordre des choses. D’autre part, le néo-libéralisme renoue avec la tradition de la bienfaisance. Des associations contre le cancer, des campagnes pour les enfants abandonnés, l’utilisation des médias (téléthon) font désormais partie de notre univers quotidien. La charité publique s’ajoute à l’assistance publique dans le réceptacle de la solidarité. Objet privilégié de solidarité, le handicapé reçoit assistance, charité, intégration, et les trois pratiques participent à la définition non du handicapé, mais de l’action sociale à son égard.

Le handicapé occupe un statut professionnel minoré : poste souvent déqualifié par rapport à la formation initiale, peu important dans la hiérarchie, financièrement au revenu diminué et dépendant de l’assistance.

Son statut social y correspond : peu ou pas de responsabilités sociales, vie assistée et faible niveau de vie, marginalité ; .... la solidarité des années 1990 prend un sens analogue à celui donné par les parlementaires de 1905 : un rapport social situé hors de la sphère de la production.

Toutefois, cette affirmation péremptoire se tempère d’une existance professionnelle et sociale qui, soixante-dix ans aprés les anciens combattants de la Grande Guerre, fait toujours figure d’expérience... Une distinction entre "handicapés lourds" (80%) et les handicapés intégrables (rentables) structure le travail social sur le handicap. Elle ne porte pas sur l’origine de ce dernier, mais sur la désignation d’un rapport social médicalisé.

 

CONCLUSION

La socialisation du handicap appelle deux remarques :

1 - La solidarité constitue le rapport entre les classes sociales dans le cadre de la société bourgeoise contemporaine. Elle est le volet social du li-béralisme. Elle chapeaute l’Histoire politique du handicap, rassemblant dans son vocable des définitions sociales, des concepts politiques et des traitements juridiques différents.

De l’infirme enfermé à l’intégration contemporaine, on y rencontre l’invalide assisté le mutilé de la Guerre tantôt héros, tantôt charge, la charité séculaire et la solidarité politique. La solidarité devient norme sociale du handicapé comme de l’infirme. Elle joue le rìôle politique de consensus unificateur de la nation où se mêlent les formes idéologiques de l’humanisme et la politique républicaine.

De l’assistance publique de 1905 à l’intégration sociale des années 80, perdurent la lutte entre l’État et la société civile dans le processus d’intégration (affrontement présent dans toutes les lois sur le travailleur handicapé), la dialectique charité/politique, la différenciation des populations désignées (entre les types de handicaps, de traitement social, d’investigations médicales...), l’assistance publique et l’intégration.

Le concept contemporain de "handicap" traîne son Histoire à laquelle s’attache la chaîne en pointillé, implicite, des anciens concepts.

2 - Il n’y a jamais rupture entre les périodes mais évolution. Même la Révolution de 1789 conserve la charité de l’ancien régime dans la conscience sociale. Les anciens concepts (infirmité, charité, le paternalisme médicalisant,...) apparaîssent dans les Débats d’aujourd’hui sur le handicap. Les tenants du "christianisme social" aussi bien que les courants explicitement réactionnaires existent bel et bien.

La III° République socialise l’infirmité en lui délimitant un espace : l’enfermement constitue le rapport social de l’infirme. L’État Providence le médicalise, puis transforme sa désignation et son statut ; la médecine s’occupe du Handicapé. La loi du 23/11/1957 introduit "handicapé" dans le dis-cours politique, mais une loi du 31/7/1963 s’intitule "allocation aux mineurs infirmes".

Les conceptions continuent de d’entremêler. Le handicapé aujourd’hui diffère profondément de l’infirme de 1905. Mais les principes du rapport de la société avec ce type de population s’établissent sous la III° République. C’est pourquoi la solidarité contemporaine, loin de rompre avec les pratiques passées, rassemble les concepts sociaux depuis 1905.

La désignation du handicap par l’État Providence, puis sa modélisation par le néo-libéralisme contemporain, la politique d’intégration sociale recherchée tant par les institutions que par les associations de personnes handicapées, ne font qu’adapter le traitement social du handicap à la période politique qu’il traverse. La fondation de l’infirme comme sujet de Droit ne remet en cause ni la charité confessionnelle, ni son statut d’objet de solidarité. Objet, le mutilé de la Guerre adulé pendant le premier conflit mondial puis réduit au rang "d’infirme à occuper" lors des Débats sur son emploi ! Objet, le travailleur handicapé, médicalisé comme handicapé et minoré comme travailleur ! Objet enfin, l’intégrable de 1975 replacé devant la minoration professionnelle par la loi de 1987, et les aléas contemporains de son statut social ! Après un siècle de politique publique, ou peu s’en faut, le handicapé devenu sujet de Droit par la gestation législative, reste objet social protégé par la solidarité.

 

NOTES BIBLIOGRAPHIQUES

INTRODUCTION

(1) DONZELOT Jacques : L’invention du social. Essai sur le déclin des passions politiques éd. Fayard, Janvier 1984, pp. 107 à 110, 115 et s.

NICOLET Claude : L’idée républicaine en France éd. Gallimard, Oct. 1982 ; chapitres V, VI et VII, sur la constitution de la légitimité républicaine. C. NICOLET étudie les fondements républicains: le radicalisme comme courant fondateur des institution contemporaines et sa doctrine sociale, le "solidarisme".

BOURGEOIS Léon : La politique de la prévoyance sociale Tome 2 ; ses discours précédant la première Guerre Mondiale fustigent le "socialisme d’Etat" allemand et lui préfèrent la "solidarité" comme élément de "défense sociale". (Cité par François EWALD : L’Etat Providence éd. Grasset 1986, pp. 363 et 397).

A. DE L’ANCIEN REGIME A 1905 : INFIRMES ET SOCIETE INDUSTRIELLE

(1) Sur le glissement de la conception évangélique à l’humanisme, voir Michel MOLLAT La pauvreté au Moyen-Age éd. Complexe collection (Coll. "H", 11), Janvier 1984, pp. 307-308.

(2) FOUCAULT Michel Histoire de la folie à l’âge classique éd. Tel Gallimard, Nov. 1976.

(3) Voir les travaux des alliénistes, de la deuxième moitié du XIX° siècle au débur du XX° siècle: SEGUIN, ESQUIROLLE, SIMON...

(4) Voir les travaux parlementaires préparatoires à la loi du 14/7/1905 s’émaillent d’interventions sur l’ordre public, la police des pauvres et des moeurs, la morale. Citons par exemple les Sénateurs GUYOT (lyonnais), et le légitimiste De l’ANGLE-BEAU-MANOIR (vieille famille du Bauvaisis).

(5) STICKER Jenri-Jacques Corps infirmes et sociétés éd. Aubier-Montaigne, Sept. 1982. Cet ouvrage est un regard sur le traitement de l’infirmité par les principales sociétés constituant l’Histoire humaine.

(6) Michel MOLLAT (op. cit.) décrit la dévaluation de la prostitution au XVII° siècle. Elle n’est plus "utile" à la cité et respectée comme telle, mais devient "associale", "malsaine", "diabolique". (7) DAVID Marcel Fraternité et Révolution française éd. Aubier-Montaigne, collection Historique, Février 1987, pp. 79 et s.

(8) CHAROY Fernand L’assistance aux vieillards, infirmes et incurables en France de 1798 à 1905 thèse soutenue à Paris le 17/1/1906, pp. 5 à 30.

(9) DONZELOT Jacques, op. cit. pp. 71-72. Voir AGULHON Maurice 1848 ou l’apprentissage de la République éd. Points, pp. 44-45 et s.

(10) Voir les Débats de l’Assemblée Constituante de l’automne 1848, intervention de LAMARTINE, HUGO, De TOCQUEVILLE... L’assistance s’impose contre de Droit au travail. (11) HATZFELD Henri Du paupérisme à la sécurité sociale 1850-1940 éd. Colin, 1971, pp. 56 et s., pp. 95 et s.

(12) GUILLEMARD Anne-Marie Le déclin du social éd. PUF, Sept. 1986, pp. 45 et s.

(13) REBERIOUX La République radicale ? 1898-1914 Paris, Seuil (Coll. Points), 1975, pp. 83 et s. (

14) LAFARGUE Paul Le droit à la paresse éd. Maspéro, Oct. 1979. Ouvrage polémique d’un militant du Parti Ouvrier Français dont Jules GUESDES est le représentant le plus célèbre.

(15) CHAROY Fernand (op. cit.) conclut sa thèse en défendant l’assistance publique comme réponse enfin trouvée à la question sociale. La solidarité y figure pp. 146 et s.

B. LA PREMIERE GUERRE MONDIALE : LES MUTILES ET LA SOLIDARITE NATIONALE

(1) J.J. BECKER et S. BERNSTEIN Victoires et frustations 1914-1929 Nouvelle Histoire de la France Contemporaine N°12, éd. Points, Avril 1990, pp. 148 et s.

Voir SAUVY Alfred Histoire économique de la France entre les deux guerres éd. Fayard, 1965, p. 442.

(2) J.J. BECKER Comment les français sont entrés dans la Guerre. Contibution à l’étude de l’opinion publique, printemps-été 1914, Presses de la Fondation nationale des Sciences Politiques, Nov. 1977.

DUROSELLE J.B. Histoire de la Grande Guerre. La France et les français, 1914-1920 éd. Richelieu diffusion Bordas, Oct. 1972.

(3) BECKER J.J. La France en Guerre 1914-1918. La grande mutation éd. Complexe, Oct. 1988, p.136.

BUCCAFURI C. article intitulé Organisation d’une journée patriotique. Tous derrière le front paru dans le Bulletin du Centre d’Histoire Cohtemporaine N¯ 26, 1985.

(4) PROST Antoine Les Anciens Combattants Presses de la Fondation Nationale des Sciences Politiques, 3 tomes, 1977.

(5) Voir le Journal Officiel des Débats : Chambre des Députés du 21.6.1916 : p.1638. Chambre des Députés du 25.12.1917 : pp.3577-3593. Chambre des Députés du 5.02.1918 : pp.301-315. Sénat du 17.9.1918 : pp. 605-612. Sénat du 27.9.1918 : pp.689-695. Sénat du 28.3.1919 : pp.373-394. La loi du 31.3.1919 sur les pensions aux mutilés et victimes de la Grande Guerre.

(6) PEITER Henri Les patrons, les mutiles de la Guerre, et la France article paru dans la Revue Recherche 1978.

(7) Voir le Journal Officiel des Débats préparatoires à la loi du 26.4.1924 : Ceux-ci s’étendent sur cinq ans, mais les dates les plus représentatives sont le 4.7.1922 pour la Chambre des Députés, et le 13.4.1924 pour le Sénat. Loi du 26.4.1924 sur l’obligation d’emploi des mutilés de la Grande Guerre.

C. LES ANNEES 30 : INFIRMES ET INVALIDES

(1) ROUSSEAU Max-Jules-Alfred Le problème de l’enfance estropiée dans le monde. L’urgence d’une solution en France Thèse pour le Doctorat en Médecine, soutenu à Paris en 1939, pp. 15 et s. , pp. 129 et s.

(2) Voir L.F. CELINE, ou B. CENDRARS, par exemples...

(3) A. TRANNOY et P. BOULINIER APF. hier et aujourd’hui, demain article paru dans Réadaptation N°215, p.4. (A. TRANNOY est le fondateur et le premier président de l’APF. (17.4.1933), et actuel Président d’Honneur.

(4) Voir H.J. STICKER, op. cit. pp.204 et s. ROUSSEAU M.J.A., op. cit. pp.168-169.

(5) BORNE D. et DUBIEF H. La crise des années 30 ! 1929-1938 Nouvelle Histoire de la France Contemporaine N¯13, éd. Points, Oct. 1989, pp.11 à 74.

(6) PROST Antoine, op. cit. tome 1.

(7) LIGOU D. Histoire du socialisme en France (1871-1961) éd. PUF, 1962, pp.396 et s.

(8) MAYER J.M. La vie politique sous la III° République 1870-1940 éd. Seuil, Coll. Points, Avril 1984, p.329.

BORNE D. et DUBIEF H. op. cit., pp. 108 et s.

D. L’APPARITION DU "HANDICAP"

a) L’Etat Providence et la médicalisation.

(1) VERDES-LEROUX Jeannine Le travail social éd. Les Editions de Minuit, coll. le sens commun, 1978, pp. 48 et s. ; pp. 58 et s. ; p. 150.

(2) Journal Officiel ds Débats : Assemblée Nationale du 07.07.1949 : pp.4320 à 4323. Assemblée Nationale du 19.07.1949 : pp.4762 à 4770. Assemblée Nationale du 30.07.1949 : pp.5625 à 5627. Conseil de la République du 26.07.1949 : pp.2236 à 2241. Conseil de la République du 01.12.1949 : p.2576. Loi du 2.08.1949 sur l’assistance à certaines catégories d’aveugles et grands infirmes.

(3) MASSON Alain Les changements immobiles. L’évolution du statut juridique du handicapé éd. Syros,novembre 1981,pp.81 et s. pp.111et s.

(4) Journal Officiel des Débats : Assemblée Nationale du 31.10.1956 : pp.4449 à 4462. Assemblée Nationale du 06.11.1956 : pp.4478 à 4480. Conseil de la République du 14.3.1957 : 717 à 729. Assemblée Nationale du 25.06.1957 : pp.2938 à 2948. Conseil de la République du 11.07.1057 : pp.1471 à 1471. Assemblée Nationale du 23.07.1957 : pp.3874 à 3878. Conseil de la République du 14.11.1957 : pp.1955 à 1957. Loi du 23 novembre 1957 en faveur de l’emploi des travailleurs handicapés.

(5) Journal Officiel des Débats : Assemblée Nationale du 27.06.1963 : pp.3748 0 3758. Sénat du 18.07.1963 : pp.1741 à 1746. Assemblée Nationale du 25.07.1963 : pp.4514 à 4516. Sénat du 26.07.1963 : p.1974. Loi du 31 Juillet 1963 sur l’allocation aux mineurs infirmes.

(6) EWALD François L’Etat Providence éd. Grasset, Janvier 1986, pp.381 et s.

(7) BARDEAU U.M. Infirmité et inadaptation sociale. Un regard politique sur l’infirmité éd. Payot, 1er trimestre 1977, pp. 60 et s.

b) La modélisation du handicap.

(1) Journal Officiel des Débats : Sénat du 14.12.1967 : pp.2337 à 2347. Assemblée Nationale du 20.12.1966 : pp. 5705 à 5715. Assemblée Nationale du 21.122.1966 : pp. 5910 à 5925. Loi du 3 Janvier 1968 sur les incapables majeurs.

(2) BLOCH-LAINE François Étude du problème de l’inadaptation des personnes handicapées. Rapport d’ensemble sur le problème de l’inadaptation Documentation française, 1967.

(3) Journal Officiel des Débats : Assemblée Nationale du 13.12.1974 : pp.7814 à 7834. Assemblée Nationale du 13.12.1974 : pp.7835 à 7852-2°séance Assemblée Nationale du 13.12.1974 : pp.7853 à 7871-3°séance Assemblée Nationale du 17.12.1974 : pp.7932 à 7952. Assemblée Nationale du 18.12.1974 : pp.8017 à 8035. Assemblée Nationale du 19.12.1974 : pp.8097 à 8112. Assemblée Nationale du 15.05.1974 : pp.2715 à 2741. Assemblée Nationale du 13.06.1974 : pp.4185 à 4188. Sénat du 10.04.1975 : pp.385 à 422. Sénat du 04.06.1975 : pp.1211 à 1222. Loi du 30.06.1975 d’orientation en faveur des personnes handicapées.

(4) Idem (3).

(5) Journal Officiel des Débats : Assemblée Nationale du 19.05.1987 : pp.1297 à 1316. Assemblée Nationale du 19.05.1987 : pp.1320 à 1346-2°séance Assemblée Nationale du 20.05.1987 : pp.1375 à 1387. Assemblée Nationale du 20.05.1987 : pp.1398 à 1424-2° séance Assemblée Nationale du 19.06.1987 : pp.2907 à 2912. Sénat du 02.06.1987 : pp.1394 à 1433. Sénat du 03.06.1987 : pp.1440 à 1469. Sénat du 27.06.1987 : pp.2715 à 2720. Loi du 10 Juillet 1987 en faveur de l’emploi des travailleurs handicapés.

Voir le rapport de LASRY C. et GAGNEUX M. Bilan de la politique en direction des personnes handicapées La Documentation française. Terminé en 1983, l’ouvrage constate la faiblesse de la politique dans le domaine de l’emploi.

De même le rapport HERNANDEZ C. L’insertion des handicapés dans la Fonction Publique La Documentation française, Août 1982.

Pascal DORIGUZZI Décembre 1990 - Janvier 1991

 

 

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